Et puis, n’est-ce pas bigrement facile, au fond, de se prendre pour un grand homme lorsque l’on n’a jamais entendu parler de l’existence d’un Rembrandt, d’un Beethoven, d’un Dante ou d’un Napoléon ? Dans son cerveau obtus, ce type ne sait qu’une chose: depuis des mois, il n’a pas perdu une seule partie d’échecs, et comme il ne soupçonne pas qu’il y a sur terre d’autres valeurs que les échecs et l’argent, il a toutes les raisons de se trouver formidable.
Il est le meilleur, le champion, l’invaincu. Il part fouler le sol argentin pour une nouvelle tournée rythmée par de nombreuses parties d’échecs. Voilà que Czentovic attire l’attention du narrateur qui partage sa traversée. D’abord peu enclin à s’intéresser à ses compagnons de voyage, il accepte une partie bien qu’il prenne considérablement de haut ses adversaires. Face à lui, douze hommes s’allient pour ne former qu’un seul compétiteur. D’abord vaincus par le champion sans trop de difficultés, ils s’offrent une revanche sans espoir. Jusqu’à ce qu’un homme, d’origine autrichienne, intervienne dans la partie pour déstabiliser le maître de l’échiquier. Une partie passionnante, riche de tensions se joue à bord, sous les yeux ébahis du narrateur.
Comme tous les têtus, Czentovic n’avait aucun sens du ridicule.
Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas tourné les pages d’un livre de Stefan Zweig. Dévorant ses livres il y a quelques années, j’avais fini par laisser un peu de côté l’homme qui a fui l’Europe sous le joug nazi pour finalement mettre fin à ses jours au Brésil.
Un livre! Il y avait quatre mois que je n’en avais pas tenu dans ma main, et sa simple représentation m’éblouissait. Un livre dans lequel je verrais des mots alignés les uns à côté des autres, des lignes, des pages, des feuillets que je pourrais tourner. Un livre où je pourrais suivre d’autres pensées, des pensées neuves qui me détourneraient de la mienne, et que je pourrais garder dans ma tête, quelle trouvaille enivrante et calmante à la fois!
Qu’il s’attaque à la passion amoureuse ou aux prodiges des échecs, Zweig reste incroyablement fidèle aux thèmes qui lui sont chers. Expert lorsqu’il s’agit de dépeindre la folie croissante des hommes, il glisse sous sa plume l’expression des névroses dévorantes, des obsessions furieuses. Qu’il se meure d’amour ou qu’il se complaise dans la folie d’une partie d’échecs, le héros de Zweig se laisse grignoter par sa monomanie. Derrière l’échiquier étourdissant fait de cases noires et blanches, ce ne sont plus deux hommes qui s’affrontent. Miroir métaphorique du conflit mondial qui déchire le monde, Le Joueur d’échecs met face à face deux hommes aux valeurs opposées, aux personnalités aux antipodes l’une de l’autre.
Et lorsqu’un prodige d’inculture et d’orgueil affronte un homme brisé par le régime nazi cela donne une nouvelle étonnante et haletante qui est parvenue à me captiver, moi qui ai autant d’intérêt pour les échecs que pour le curling…
Vouloir jouer aux échecs contre soi-même, est donc aussi paradoxal que de vouloir marcher sur son ombre.
Un classique qui souligne la maîtrise impeccable et implacable du récit de Zweig qui joue de sa plume pour croiser les récits qui relatent le passé des deux adversaires. On en perd la notion du temps, on se prend au jeu et l’on s’installe dans cette pièce, portes closes, où deux hommes ne se quitteront pas sans que le véritable vainqueur ait été déclaré. Captivant.
Un livre à lire en tête à tête…
L’adaptation de la nouvelle en BD: Le Joueur d’échecs – David Sala
Pour prolonger un peu vos lectures sur Zweig:
Les derniers jours de Stefan Zweig.
Le Joueur d’échecs – Stefan Zweig
Publié à titre posthume en 1943
128 pages / 3 €
ISBN: 978-2253174073
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Ma résolution livresque étant de lire (au moins) 12 classiques dans l’année, voilà le récapitulatif de mes lectures, mois après mois… (Pour le moment, je respecte étonnamment mon carnet de route…)
◊ Janvier:
La Machine infernale – Jean Cocteau. / Une nuit avec Verlaine – Sophus Claussen
◊ Février:
Le Joueur d’échecs– Stefan Zweig
Lu au lycée, j’en garde un bon souvenir
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Je pense que j’en garderai aussi un très bon !
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Enfin un livre que je connais, que j’ai lu, que j’ai aimé…
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Ah enfin, nos lectures s’accordent ! 😉
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L’avantage des adaptations BD c’est que ca permet de retrouver des classiques. L’adaptation de David Sala est très bonne aussi.
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Je suis justement venue vers ce classique pour pouvoir lire l’adaptation BD que l’on m’a offerte à Noël. Je vais pouvoir me lancer désormais, d’autant que j’admire le travail de David Sala (découvert avec ses albums…)
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Pas lu mais il le faudrait bien…
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C’est ce que j’ai fini par me dire. Contente de m’être lancée !
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Zweig mon amour… il y a une adaptation BD de celui-ci aussi je crois. J,en garde un excellent souvenir. j’adore la plume de Zweig. Elle m’emporte.
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Oui, elle m’attend. Mais tu te doutes bien que j’avais envie de lire la nouvelle avant… J’ai parfois éprouvé une certaine lassitude face aux névroses des personnages… Mais j’ai adoré le retrouver ici…
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Je l’ai lu au collège et j’en garde un souvenir tenace. Ce fut mon premier Zweig, et depuis je n’ai jamais été déçue par l’auteur.
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C’est là le pouvoir des grands classiques. Moi, j’aime Zweig même s’il m’agace un peu parfois… Ses excès, ses héros obsessionnels. C’est là sa marque de fabrique et j’aime faire des pauses. Cela faisait des années que je ne l’avais pas relu…
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Ce livre m’avait captivée! Je le classe parmi mes préférés.
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Et tu as lu la BD qui adapte ce texte? Une merveille!
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Non je l’ai repérée mais pas encore lue !!
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Ce sera ma BD de la semaine ! 😉
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Super, hâte de lire ton billet alors !! 🙂
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Je l’ai vu au théâtre cet été. Un très beau texte…
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J’ai tellement aimé Le voyage dans le passé, qu’il faut que je lise d’autres livres de l’auteur !
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24 heures dans la vie d’une femme / lettre d’une inconnue… Le choix est vaste…
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Un classique que j’ai lu et relu ( mon seul Zweig d’ailleurs…il faudrait que ça change) .
J’ai lu il y a peu la Bd tirée de ce roman, c’est une belle adaptation.
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A l’heure où tu écris ce message, la BD est à mes côtés pour une lecture-thé matinale…
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Je l’avais au programme du bac. A cette époque, il ne m’avait pas follement emballée mais, malgré mon excellente prof de Lettres, je n’avais pas compris grand chose. Je manquais de maturité, je crois… Depuis, j’ai redécouvert Zweig, lu plusieurs de ses oeuvres que j’ai adoré pour la plupart et j’ai relu Le joueur d’échecs, du coup. Je l’ai trouvé virtuose cette fois. A chaque fois, Zweig me saisit.
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J’aime ces titres qui prennent une autre dimension avec le temps…
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Tu me donnes envie de retrouver la plume de Zweig ! Lettre d’une inconnue fait partie de mes textes préférés. J’ai aimé Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, mais un peu moins. Je note Le joueur d’échecs, et j’ai très envie de lire La confusion des sentiments aussi.
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J’ai eu ma période Zweig qui a fini par me lasser un peu. Mais j’avoue avoir été ravie de le retrouver ici sur un autre terrain que le sentiment amoureux…
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Excellent roman, à la fois si court et si riche, tout en étant prenant. Un grand plaisir de lecture.
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