Après la mort de Dieu, qu’on pressent dans ces vers, il reste à adorer le vivant. Arnaud de la Croix – Préambule
Qui dit premier mardi du mois, dit textes grivois pour les lecteurs en émoi. L’idée cette année est de varier les plaisirs et les genres… Après une première participation au rendez-vous coquin de Stephie avec la BD Esmera, c’est sur ce recueil poétique illustré par Renée Follet que j’ai jeté mon dévolu, pour votre bon plaisir chers lecteurs.
Ma plume est lente, et ma main paresseuse
Le sens me fuit, par la crainte amoureuse
En disputant sans résolution
De déclarer, ma grande passion.

Si les premiers poèmes de ce recueil sont con-sacrés à la chevelure des femmes, le regard des poètes se déplace rapidement, épousant les formes du corps féminin vénéré, idolâtré, maintes fois décrit et observé. On glisse des boucles d’une crinière généreuse et sensuelle au cou qui se dévoile, on s’arrête un instant sur une poitrine délicate, on parcourt le ventre doux pour s’abandonner, au cœur des bijoux indiscrets. Ventre, cuisses, sexe… Le lecteur murmure ces poèmes soigneusement sélectionnés comme le poète balade ses lèvres sur le corps des femmes pour mieux saisir chaque relief, chaque aspérité, chaque singularité de cet espace intime. Une invitation au voyage gorgée d’un érotisme subtil, contenu, beau car suggéré plus qu’imposé.
Ce con plaisant, ce con, tant digne de choses
Que je puis dire et sans imputer vice
Au reste, tout fait pour son service
Donc du corps entier au départi
Je prends le con, c’est le meilleur parti.
Guillaume Bochetel
Il faut dire aussi que la plupart des poèmes choisis sont des blasons de la Renaissance et qu’ils paraissent presque dictés par une retenue pudique, vite abandonnée dans les textes érotiques plus modernes. La tradition du blason est toujours respectée mais ouvre lentement la voie des poètes modernes. (Marot et son blason du tétin est évidemment cité et certains textes portent en eux les germes d’autres poèmes plus audacieux que Rimbaud ou Baudelaire reprendront avec leur provocante singularité…) D’autres noms de poètes (Brodeau, Chappuys) jusqu’alors totalement inconnus pour moi fleurissent au fil des pages nous laissant ou non le choix d’approfondir la découverte au-delà de cette lecture…
Cuisse qui n’a ride ni fonce
Mais bien provocante semonce
Qui vient saisir le poursuivant
De mettre la main plus avant.
Guillaume Bochetel
En miroir, les esquisses au crayon/fusain de René Follet qui se glissent au milieu des mots et donnent une saveur particulière à ce recueil poétique. Les vers et les strophes cèdent la place aux femmes croquées, lascives. J’ai souvent pensé au merveilleux Je t’aime de Barbe-Cavanna pendant ma lecture. Au-delà de la dimension poétique, ce livre nous donne à tourner des pages qui seraient celles d’un carnet d’artiste qui ne demande qu’à être rempli de ces corps aux courbes charmantes. Si le corps masculin est relativement absent des textes choisis, il retrouve pleinement sa place lors des scènes d’étreintes (d’une beauté évidente) dessinées sur l’épais papier de ce recueil qui, pour couronner le tout, se veut également un très bel objet livre à garder précieusement sur vos étagères indiscrètes.

Une chronique qui me permet de participer au rendez-vous de Stephie (les billets des autres participants sont ici) mais aussi au challenge Un classique par mois chez le Professeur Platypus avec ce recueil poétique de la Renaissance.
Blasons du corps – René Follet
Adapté en français moderne par Arnaud de la Croix
L’Index – Editions POINT IMAGE-JVDH
ISBN : 2-930110-89-9
25 €
Janvier 2003


Le premier mardi du mois est donc mon nouveau jour préféré…
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Ah ah ! Je vais donc choisir avec zèle et ferveur mes prochains titres pour illuminer tes premiers mardis. (Non, ne me remercie pas, ça me fait plaisir.)
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Hehe 😉
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Si en plus c’est un très bel objet. Je parle du livre, bien sûr….
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Oui… 😉
Pourquoi se priver n’est-ce pas? ^^
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Un dessinateur incroyable René Follet ! Un vieux monsieur très discret mais son diptyque « Terreur » reste un grand souvenir de lecture.
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Je le découvre avec ce titre illustré. Et autant dire que j’adore. Je vais aller jeter un oeil au fameux diptyque dont tu parles.
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Oh oh oh, ça me tente assez !
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Ah ah ah ! La bonne nouvelle que voilà. ^^
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Ce coup de crayon me chavire, j’adore… ❤
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J’étais certaine qu’il te plairait et te « parlerait ».
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Aussi doux qu’une caresse, ce livre semble écarter tout voyeurisme. Tu parles de subtilité, de force de suggestion… beaucoup de délicatesse dans ce recueil visiblement. Et les illustrations que tu partages sont à tomber. J’y jetterai surement un œil coquin à l’occasion 🙂
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Après, il faut aimer les poèmes de la Renaissance… Sinon, tu te contenteras des images. ^^
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Je me contenterais bien des blasons (l’ajout « du corps » me semble presque étrange et redondant dans le titre, en connaissant le genre, au moins de façon théorique) de la Renaissance, mais un beau-livre aussi joliment illustré n’en a que plus de charme sur les étagères indiscrètes… J’aime l’idée d’une anthologie de ce genre poétique, un peu plus resserrée que les anthologies érotiques dont j’ai déjà une petite collection. Je note soigneusement le titre. 🙂
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Oui, tu as tout à fait raison concernant la redondance.
Tu en connais sûrement plus que moi concernant les auteurs de l’anthologie que je n’avais pas tellement croisés dans mes parcours de lecture…
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