Que peut bien apporter un corbeau à une meute d’humains en deuil? Un ciment. Un pouls. Une plaie. Une bonde. Un gouffre. Un poids.
Leur petit refuge est bien vide d’elle et s’ils sont encore sous le choc de la nouvelle c’est remplis d’une douleur incommensurable qu’ils tentent surmonter les jours d’après. Dévasté par la douleur et l’incompréhension le jeune homme devenu veuf avant de voir ses cheveux blanchir est désormais le pilier fragile d’une famille écorchée.
Il était une fois un démon qui se nourrissait de la douleur des hommes. L’arôme délicieux du choc pur et de la perte brutale flotta jusqu’à lui depuis les portes et les fenêtres du logis éploré d’un veuf. Alors, le démon se mit à chercher un moyen d’y entrer.
Dans un bruissement d’ailes, arrive le volatile au noir plumage. Il dépose quelques plumes comme d’autres monteraient patte blanche et s’invite dans la demeure endeuillée. Le chant du corvidé bavard tantôt ricanant, tantôt consolant, tantôt apaisant, se fraie un chemin pour libérer une parole étouffée dans la peine. Comme une allégorie de l’immense tristesse qui le ronge, le corbeau vient virevolter autour du héros pour devenir un étrange compagnon sur le tortueux chemin qui conduit vers le retour à la vie.
Tourner la page, le concept, c’est pour les idiots, toute personne sensée sait que la douleur est un projet à long terme. Je refuse de précipiter les choses. La souffrance qui s’impose à nous empêche quiconque de ralentir ou d’accélérer ou de s’arrêter.
L’expression « léger comme une plume » n’a jamais aussi mal porté son nom. Quand certains font de leur tristesse un manteau, le héros ordinaire de ce roman a fait de sa douleur un costume de plumes. Dans un jeu polyphonique où s’entremêlent trois voix au souffle singulier s’écrit une histoire aussi curieuse qu’atypique. Parfois, la narration a quelque chose de déstabilisant et le ton peut se vouloir déroutant face à l’incongruité d’une telle situation. Voilà un texte inclassable qui m’a parfois laissée un peu en retrait, étant à la fois témoin passif et lectrice compatissante… Puis, la plume de Max Porter a fini par me ramener doucement vers le texte, vers des mots souvent teintés d’une musique douce, d’un phrasé vif gorgé d’une poésie qui en devient lumineuse et légère. (Et cette fin si belle et joliment contée…)
Si les pages de ce livre se tournent à une vitesse folle, il m’aura pourtant fallu un peu de temps pour apprécier ce premier roman à sa juste valeur. Sans nul doute, il bouscule, sans nul doute, il dérange. Mais il offre finalement aux lecteurs des pages pleines d’audace qui au-delà de la question du deuil et de la perte d’un être cher nous apprennent lentement à faire s’envoler toutes les plumes noires un peu trop lourdes sur nos oreillers.
Les chroniques de Nadège, Cathulu, Noukette, Hop sous la couette, Krol & Jérôme.
Un nouveau titre qui me permet de participer au challenge de la rentrée littéraire de janvier 2016 chez Laure.
La douleur porte un costume de plumes – Max Porter
Traduit de l’anglais par Charles Recoursé
Roman – Seuil
122 pages / 14€50
ISBN: 9782021243567
J’ai ce livre dans ma PAL et je doit avouer que les chroniques me perdent un peu et sont très divisées! Mais la tienne me redonne envie de le lire =D
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Je comprends cette division. Et j’aime qu’un livre provoque cela chez les lecteurs. J’avais comme l’impression que la frontière entre le « j’aime ce livre » et « je ne l’aime pas » était faible… J’ai fini par choisir mon camp.
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Dans ce cas je n’ai plus qu’à le lire pour choisir le mien ^^
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Voilà! Et quel que soit le verdict, je te souhaite une belle lecture. ^^
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Merci! =D
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J’aime les histoires déstabilisantes et déroutantes… Et comme toujours ta critique est vraiment très bien rédigée…
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Celle-ci l’est véritablement. Surtout dans sa narration. (Et comme toujours, merci…^^)
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ce livre n’a pas du tout fonctionné pour moi, je crois que je l’aurais apprécié si je savais lire l’anglais, il y a quand même de très belles pages sur le deuil.
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De très belles pages et d’autres plus déconcertantes… C’est là toute la curiosité de cette publication.
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Oh là là, un sujet lourd. Pas pour moi …
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Certes le sujet est lourd. Curieusement, ce n’est pas du tout ce qui m’a le plus marquée dans le livre.
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Il me tenterait bien…
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Tu sais ce qu’il te reste à faire…
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Merci pour ta très belle chronique. J’ avais déjà été tentée en lisant le billet de Noukette. Donc là, il devient urgent que je lise ce livre! Et le titre est si beau
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Il faut aussi se préparer à découvrir un livre atypique. Un titre qui divise à en croire les commentaire. Bonne lecture Celina!
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Repéré aussi déjà, c’est apparemment une lecture dérangeante et surprenante mais un sujet bien lourd et je sors tout juste d’une lecture éprouvante (Appartenir) alors pour l’instant ce n’est pas d’actualité. Il attendra sans doute une sortie poche… Bon week end
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Je trouve que l’auteur évite malgré tout la lamentation gratuite. C’est délicat. Et parfois décalé. Bon week-end à toi aussi !
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J’imagine que le livre est beau, tout comme l’écriture,je vais le garder pour plus tard, un jour de très grande forme!
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C’est une lecture atypique. Qui plaira ou laissera totalement indifférent.
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C’est dans la seconde partie que le texte a pris son envol et que la magie a opéré pour moi. J’en suis sorti tout retourné et j’ai adoré ça 😉
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Donc toi aussi tu as eu l’envol tardif. (Je l’ai acheté suite à ta chronique. Et je ne suis pas déçue. Évidemment.)
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Je l’ai acheté !
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J’ai trouvé ce premier roman proprement fascinant… J’aime sortir de ma zone de confort, on peut dire que là je n’ai pas été déçue… ❤
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J’ai déjà repéré ce roman, mais je ne suis pas sûre d’être capable de le lire avant quelque temps (émotionnellement s’entend…)
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Ta chronique est magnifique! Je l’ai terminé il y a quelques jours, et ce roman m’a beaucoup déroutée… Tu le décrit en tous cas à merveille. c’est un texte qui ne se laisse pas facilement appréhender.
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Une lecture qui fait s’envoler les plumes noires sur nos épaules, ce n’était pourtant pas gagné à lire le début de ton billet.
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J’apprécie beaucoup les extraits que tu cites. A voir s’il me tombe dans les mains, du coup 🙂
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Tant qu’il ne te tombe pas des mains… ^^
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L’histoire n’est-elle pas « plombante » avec pour thème le deuil? Le corbeau n’est pas non plus pour me plaire, cet oiseau me donne froid dans le dos 🙂 Mais les extraits que tu as choisis sont intéressants et surtout surtout ce billet… waw!!!
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Merci beaucoup pour ta participation, avec beaucoup de retard … Je suis en train de le rattraper 🙂 J’étais très intriguée par ce premier roman, mais n’étant pas une grande adepte des oiseaux, je resterai sur ton avis.
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Je suis la Reine du retard alors ne t’en fais pas…
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Superbe billet ! 🙂 J’aurais voulu partager ton enthousiasme final, mais l’envolée n’a pas eu lieu.
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