BD de la semaine·Et mon coeur fait boum·Neuvième art

Jours de sable – Aimée de Jongh

Demande à la poussière.

Nous savons qu’il faut partir […] pour ne pas devenir fous.

Alors que l’Amérique des années 30 est en pleine crise économique, John Clark, 22 ans, fils de photographe émérite est recruté pour un reportage photographique sur les terres arides de l’Oklahoma et du Kansas. L’ennemi juré ? Le Dust Bowl ou ces tempêtes de poussières d’une violence sans nom. Sur place, il rencontre les populations qui ont parfois tout perdu et vivotent tant bien que mal avant de se résoudre à quitter leur demeure et leurs terres envahies par cette fine poussière meurtrière. Comme un élève consciencieux, il remplit sa mission en cochant les cases d’une liste d’éléments incontournables à photographier et à renvoyer à son patron. Ladite liste ne manque d’ailleurs pas de cynisme et si le temps manque, il est vivement encouragé à manipuler un peu les cadrages et mises en scène pour parvenir au plus vite à ses fins. Qu’importe l’exactitude des faits si le travail est vite accompli?

Le paysage d’ici ressemble à un océan secoué de vagues. […] Ils doivent vivre avec ces deux fléaux… Les nuits de poussière et les jours de sable.

C’est quoi la vérité cachée ? Pourquoi devrais-je la dénicher ? La vérité elle est déjà assez pesante comme ça. Avec ses couleurs, ses goûts, ses odeurs, ses sons. Sa chaleur, son froid, ses émotions, sa douleur.

Un périple initiatique

Il y a quelque chose de profondément steinbeckien dans ce portrait de l’Amérique des petites gens et des grands espaces. Exode, familles à la dérive, espoirs d’ailleurs meilleurs et destinées chaotiques. C’est probablement l’une des raisons qui m’a fait tant aimer ces pages. Le travail graphique – et scénaristique – d’Aimée de Jongh est une porte d’entrée vers un monde hostile où la touffeur conditionne chaque respiration, où la chaleur et l’aridité condamnent toute perspective de voir l’horizon sous le prisme de l’optimisme. Au cœur des cases, c’est une palette tourbillonnante d’ocre, de rouge et de nuances orangées qui donne aux illustrations un réalisme étourdissant qui laisserait presque penser que la poussière s’est invitée entre les pages comme le sable le fait pour une lecture estivale.

Aimée de Jongh parvient à s’appuyer sur des documents d’archives et des photographies d’époque pour faire de cet album à la dimension romanesque évidente un témoignage historique d’un épisode de l’Histoire des USA. En bien des points captivante, cette BD nous livre une intrigue qui offre également à son héros des perspectives inattendues: de cette poussière dévastatrice, il renaîtra. De cette région indomptable, il apprendra à mieux regarder le monde. Dans cette mission si singulière, il trouvera assurément ce qu’il s’attendait le moins à croiser sur son chemin. 

Échos et prolongements :

Les Raisins de la colère – John Steinbeck

 

Jours de sable – Aimée de Jongh
Éditions Dargaud

29,99€ / 288 pages / 2022
BD de la semaine / 9e Art

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Et ce mercredi, les chroniques de la BD de la semaine
sont au milieu des livres pour une thématique autour des bulles d’été

Merci à tout·es les participant·es qui font vivre ces RDV du mercredi !

Nous laissons place à la trêve estivale et vous retrouverons à la rentrée.

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Eimelle                                         Pati                                        Mylène

Lætitia                                               Nat                                                Caro

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