Il n’y a pas d’amour léger et la douceur des soirs de juin ne dure pas.
Amours plurielles
Une rencontre. Une rupture.
Et entre ces deux instants, tant de possibles à vivre, fantasmer, déplorer, explorer. Parfois, la lassitude et les désillusions s’invitent au fil des mois mais elles s’oublient dans les bras – et les draps – d’un·e inconnu·e. Parfois elles restent tapies dans l’ombre des années, masquée par les familles que l’on construit dans un sursaut d’amour qui n’existe déjà plus. Parfois, elle joue les invitées tardives, vous rappelant que vous vous êtes un peu trop oublié·es. Parfois, elles vous posent un lapin, ne sont jamais au rendez-vous et vous font croire à l’amour fou. Cela en fait des histoires à raconter. Cela en donne des occasions pour dire l’amour qui tour à tour transcende et déçoit.
On peut aimer bien plus de fois qu’on ne se l’imagine dans une vie. Chaque amour libère du précédent. Ce que l’on veut, c’est aimer et être aimé. Si on nous donnait à vingt ans la liste de tous ceux qui pourraient nous rendre heureux, nous traverserions la vie avec une légèreté de phalène. Voilà, c’est à ça qu’il faut travailler, s’alléger.
Dans Le Poids du monde est amour, David Thomas nous livre ses fragments amoureux. Difficile de ne pas songer immédiatement à Roland Barthes, il est vrai. Néanmoins, son style donne la part belle à la concision. Maître dans l’art du récit bref et plutôt habile quand il s’agit de nous mener jusqu’à sa chute – qu’elle soit douce, pleine d’espoir ou terriblement amère – David Thomas est diablement bon quand il fait de ses petits textes autant de voix à écouter. Vite pris·es au piège de sa plume désabusée, nous tendons l’oreille, bercé·es par cette petite musique mélancolique dont lui seul maîtrise avec brio la partition.
De nous trois, c’est sans doute lui qui souffrira le plus de cette aventure. Ou elle. Ou moi. C’est comme un jeu. Un jeu dangereux car c’est l’orgueil qui distribue les cartes.
Vers la légèreté
Le mélange des tons est une fois encore au rendez-vous et autant dire qu’il fait mouche. L’on savoure chaque récit comme autant de témoignages sur la vie de couple, d’amants, de parents, de célibataire fraîchement libéré ou abandonné, de femme trompée, d’homme délaissé. L’amour et le désir s’y racontent avec humour et désarroi et l’on devine aisément les blessures, les ratés et les illusions perdues qui ont jalonné ces vies-là.
J’ai été bien conne de croire ceux et celles qui croyaient que la fête était finie. Elle ne fait que commencer. On n’est pas obligé d’être deux pour danser.
Dans un style simple et une spontanéité résolument modernes mais avec une acuité évidente concernant les relations amoureuses, l’auteur déploie joliment sa palette de personnages et parvient même à créer des échos entre ses textes comme pour donner aussi librement la parole à l’un·e que le droit de réponse à l’autre. Une jolie balade au cœur même des méandres des sentiments humains et autant de textes qui parlent irrémédiablement de nous dans nos grands bonheurs et nos délicates maladresses.
Bientôt, nous allons nous déshabiller de nos pudeurs, nos humeurs auront le dessus sur nos désirs, nous allons taire des choses pour nous autoriser d’en dire d’autres, nous négocierons avec nos tolérances, la beauté va se déplacer, bientôt, le sédiment de notre joie ne troublera plus la qualité de notre amour, il finira par se poser et révélera alors la clarté de nos sentiments. Le réel va nous infliger son poids, à nous de l’ignorer. Nous allons pouvoir nous aimer pour ce que nous serons et non pour ce que nous espérons.
Mai en nouvelles chez La Nuit je mens et Hop sous la couette ! Deuxième titre de ma sélection !
David Thomas au milieu des livres: On ne va pas se raconter d’histoires
BO des pages tournées: Tous les visages – Pierre Lapointe
Le Poids du monde est amour de David Thomas Éditions J’ai lu 6.90 € / 172 p / 2019 Coup de foudre – L’art du récit – Mai en nouvelles |
Je suis entièrement d’accord, cet auteur a un sens du récit court absolument extraordinaire.
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C’est assez incroyable d’être aussi efficace et captivant sur des formats si courts. (Moi qui suis une adepte du genre romanesque.)
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bon elle recommence ! tant mieux, décidément il faut que je mette la main sur l’un de ses livres !
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Tu me tentes à nouveau ! ^^
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Mon côté récidiviste !
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On ne t’arrête plus ! 😁
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Encore deux titres si je m’organise bien…
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Je me répète, on ne t’arrête plus !
(Mais tu avais donc autant de recueils de nouvelles chez toi ?!)
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(Oui. Des trucs qui datent un peu et que je tardais à sortir de ma PAL. Pour le David Thomas, je regrette d’avoir attendu si longtemps. Pour les autres c’est une découverte qui me change un peu de mes immersions romanesques… )
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Ce challenge me donne envie d’être un peu plus attentive à ce genre que je lus peu surtout si les récits sont efficaces et captivants 😉
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Cet écrivain est assez fort pour dépeindre le couple et ses failles, la vie et ses usures. Je l’aime beaucoup je crois.
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Quelle chronique !
J’aime et je note, même si le format n’a pas ma préférence. Qui sait ?!
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Moi non plus. Ce n’est vraiment pas mon genre de prédilection. Mais ça marche assez bien ici. (Me concernant en tout cas…)
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Ta chronique me fait penser à la phrase de Richard Desjardins: «Quand j’aime une fois, j’aime pour toujours ». Très belle suggestion! Merci!
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Ton enthousiasme est contagieux! Je viens justement de terminer «Seul entouré de chiens qui mordent». Une très belle découverte et je compte remettre ça.
Tu le dis bien: David Thomas est maître dans l’art du récit bref. Il maîtrise à merveille la forme.
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David Thomas est fort dans son domaine. Tu sais nous séduire…
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Je ne lis pas assez à mon goût. (Merci !)
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