Vaisselle qui s’amoncelle dans l’évier, cafetière au dévissage capricieux, désordre négligemment orchestré suite à un changement d’adresse forcé, visage marqué par le manque d’entrain et de sommeil, volonté de sortir pour se changer les idées avoisinant le degré zéro de la motivation. Coralie est désormais célibataire et chercher à trouver sa place dans l’appartement qui va être le témoin de sa nouvelle vie. Passée sa période de deuil amoureux, elle cherche à voir de nouveaux visages et tente de donner un nouveau souffle à sa vie sociale. Cours de capoeira, sorties entre amis et collègues : toutes les occasions sont bonnes pour provoquer les nouvelles rencontres.
Quand les choses font à moitié partie de nous, on croit qu’on les connaît et on ne se pose pas de questions.
Autour d’elle, des visages venus d’ici et d’ailleurs. L’une a la peau noire, l’autre les yeux bridés, celui-ci est originaire d’Algérie, celle-là a les cheveux blonds et trop de rondeurs pour s’apprécier. Le cercle amical qui entoure Coralie est fait de métissages et d’horizons divers. Leurs conversations sont celles de presque trentenaires qui se cherchent en bien des domaines sans toujours se trouver et souvent, la question des origines revient autour de la table comme une rengaine qui pousse à l’introspection.
On trimballe des choses qui ne nous appartiennent pas forcément.
Au fil des rencontres, une amitié se tisse entre Coralie et Kamel. Tous les deux s’interrogent régulièrement sur les racines qui les lient respectivement au Laos et à l’Algérie. Tirer sur ce fil les conduit à questionner leur passé en cherchant à le comprendre, sans pour autant avoir toutes les clés en main. Il est aussi question ici des croyances, des rites qui nourrissent les valeurs de leurs ancêtres ou les membres de leur famille qui vivent parfois encore à l’étranger. Chaque conversation, chaque épisode où l’ailleurs est évoqué est souvent présenté comme une ouverture à l’autre, qui stimule la curiosité et le goût du lointain. (Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais cela procure une vraie bonne bouffée d’oxygène et d’humanité au milieu des discours nauséabonds trop souvent relayés non?)
A ces conversations se mêle un récit des plus plaisants qui n’est pas sans rappeler les thèmes qui m’avaient déjà séduite dans son album précédent. Vanyda a ce talent particulier pour nous raconter ces histoires d’amour et d’amitié qui pourraient être les nôtres. Elle dépeint la génération qui est la mienne avec une tendre justesse qui nous porte au fil des pages. Coralie est une jeune femme indépendante, spontanée et l’on s’identifie volontiers à cette demoiselle un peu perdue dans une vie qui n’a pas nécessairement pris la tournure attendue. Avec beaucoup de finesse, Vanyda laisse lentement les personnages qui gravitent autour de son héroïne s’inviter dans le récit et leur donne progressivement une belle envergure en les rendant particulièrement attachants et touchants dans leurs tourments et inquiétudes.
Je sais pas… J’ai eu une vision de l’ennui total avec lui. Une gentille femme dans un pavillon de banlieue, grosse bagnole, deux gosses, chien et apéro avec les amis le dimanche. Chemin tout tracé jusqu’au cercueil.
Quant au travail graphique, on reconnaît le trait de Vanyda au premier coup d’œil. L’influence du coup de crayon proche de l’univers du manga n’est jamais bien loin mais elle sait se l’approprier à merveille en lui offrant un horizon plein de relief et de chair. Enfin, si j’avais beaucoup aimé le petit supplément d’âme apporté par le travail à l’aquarelle dans Un Petit Goût de noisette, je ne suis absolument pas déçue par le choix d’un album qui prend forme derrière un noir et blanc plein de nuances de gris d’une grande finesse et délicatesse.
Voilà un album qui marque une réelle volonté de poser les grandes questions qui entrent en considération chez ceux et celles confrontés à la quête identitaire. Derrière le ton léger et badin de la conversation entre amis émergent les motifs incontournables liés à la question du métissage : racisme, clichés, croyances et modes de vie. La polyphonie des échanges fait en sorte que tous les discours se croisent et se mélangent, venant pointer du doigt, en toute discrétion, des sujets plus épineux et délicats.
Après l’immense coup de cœur que j’ai eu pour Un petit goût de noisette, autant dire que j’attendais ce nouvel album avec une certaine impatience. Ce fut une lecture vraiment plaisante qui témoigne d’une belle évolution dans l’œuvre de Vanyda. Les sujets plus légers de l’adolescence et des émois des jeunes adultes poursuivent leur chemin en devenant la trame secondaire de ce nouveau titre, qui met habilement en lumière des préoccupations et des questionnements d’une belle profondeur, offrant un écho à une actualité particulièrement loquace sur la question de l’identité. Une BD « entre ici et ailleurs« , entre fiction et récit intimiste qui tient très honorablement ses promesses.
Entre ici et ailleurs – Vanyda
14€99 / 192 pages
ISBN : 978-2-5050-6471-8
Janvier 2016
J’aime beaucoup la façon dont tu parles de BD, cela me donne toujours très envie de découvrir les titres =)
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Alors j’espère que mes conseils te plairont lorsque tu les auras entre les mains. Merci ! Bises et bonne semaine.
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On sent à quel point tu apprécies le travail de cette auteure. Ce billet est très agréable à lire.
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Il faut vraiment que je découvre sa série Celle que je…
Merci Luocine.
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Belle critique… Dernièrement, j’ai enfin lu une BD 😉 Et oui tout arrive 🙂 Il s’agit d’ « Alcoolique » de Jonathan Ames.
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Oh ! Quelle belle nouvelle ! Et quel bon choix. J’ai failli l’acheter samedi. Et je lui ai préféré une robe.
Hâte de lire ta chronique.
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C’est un ami qui me l’a offert 🙂 Et une nouvelle robe, c’est aussi très sympa 😉
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Ton ami a du goût.
Et toi aussi. 😉
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J’oubliais, je ne sais pas si je rédigerais une critique de la BD…
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Ta chronique donne envie de découvrir cette BD… Et aussi « Un petit goût de noisette » que j’ai repéré dès sa sortie !
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J’ai une petite préférence pour Un petit goût de noisette mais celui-ci est très bien également.
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Je sais lequel lire en premier alors 😉
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« Un petit goût » fonctionne comme des petites nouvelles, celui-ci est un récit plus long, plus poussé et approfondi dans les relations qu’entretiennent les personnages. A toi de voir ! 😉
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Je ne connais pas encore le travail de Vanyda, il faut que j’aille voir ça de plus près ! Les thèmes abordés me plaisent bien.
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Alors oui, c’est l’occasion de la découvrir. Vraiment.
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très belle chronique, tu sais donné envie ! merci !
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Je le lirai cet album, je garde un très bon souvenir de ma rencontre avec Vanyda à Amiens (qui est par ailleurs fort jolie, ce qui ne gâche rien, tu en conviendras 😉 ).
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Je l’avais aussi rencontrée à Amiens. Mais j’ai un doute, nous avions pu nous voir ce jour-là?
(Et je plussoie, c’est une très jolie nana pleine de talent.) J’avais dîné à sa table lors du Festival BD mais nous avions peu échangé puisque je papotais avec M’sieur Damien Cuvillier et ses copains bretons.
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Vu à Angoulême et approché la demoiselle, noté et quand me serai refait le porte monnaie, irai me plonger dedans 😉
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Oui, j’avais lu qu’elle y serait. Bonne reconstruction financière. Après un WE comme Angoulême, ton banquier doit avoir passé l’arme à gauche.
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mais g progressé hein depuis le salon du livre de Paris, presque raisonnable ai été si si 😉
« TOUSSAAAAAAAAA » a crié mon poilu…
Erf il parait que g encore des progrès à faire ! Mais comment résister ?!
Et en effet, com dit chouchou, Vanyda est drôlement jolie 😉
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Ce genre de progression demande du temps. Et de l’entraînement, et des confrontations aux tentations, et des échecs et de nouvelles tentatives… Et puis des progrès, tu en feras. Un jour. ^^
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au programme ce soir 😉
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Belle soirée lecture alors….
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J’ai lu les 20 premières pages en ligne et depuis j’ai envie de découvrir cette BD. Je me trompe où tu es tout de même un peu moins enthousiaste que pour son précédent album ?
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J’ai beaucoup aimé mais disons que le thème me touchait moins que dans Un Petit goût de noisette. Du coup, je ne parlerai pas de coup de cœur mais d’une très belle lecture. (Ce qui est déjà très chouette.)
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Cet album me fait trop envie ! Rien que de lire ta chronique je suis émue.
J’ai adoré Celle que… et l’immeuble d’en face. Il serait temps que je lise ses dernières bd !
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J’ai découvert Vanyda il y a 2 ou 3 ans et j’ai très envie de lire son dernier album .. et effectivement il est intéressant de voir son évolution, passer des histoires d’ados à des histoires d’adultes.
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enchantée par cet album !
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