L'Art du Roman·Que jeunesse se fasse...

J’ai suivi un nuage – Maëlle Fierpied & Julie Guillem

Il ne sait plus comment contenir sa joie et l’euphorie de sa mère est communicative. Qui aurait pu croire un seul instant que Marie Cotillon, star internationale de cinéma – et amie d’enfance de sa mère – s’inviterait pour boire le thé à la maison? Fier comme un paon à l’idée de préparer l’arrivée de cette invitée pas comme les autres, le jeune Rémi en perd un peu le sens des réalités. On sonne à la porte et l’arrivée de la vieille voisine le fait dégringoler de son petit nuage pour être confronté à un problème de taille…

Nous sommes dans un jour gris. Ces jours-là, maman est grise elle aussi. Triste, molle et fragile comme du verre.

Parce qu’il va bien falloir admettre que cet emportement n’était pas le premier, Rémi n’a d’autre choix que d’accepter que la liesse maternelle n’est qu’un masque de bonheur illusoire. Le lendemain, c’est une mère éteinte, fermée et d’une infinie tristesse qui se trouve recroquevillée sous sa couette, peu disposée à se confronter aux autres. Les jours à venir seront teintés de gris, de peine et de questionnements dans l’esprit de ce petit garçon qui devra passer un moment chez ses grands-parents, le temps de l’orage…

Si maman est un nuage, moi je suis le petit arbre en dessous. Alors, quand maman pleure, c’est moi qui suis mouillé.

Quelle délicate manière d’aborder avec autant de subtilité ce sujet aussi sensible. A travers les yeux d’un enfant, Maëlle Fierpied raconte le mal-être adulte, celui qu’on peine à comprendre quand c’est essentiellement à lui d’endosser le lourd manteau des responsabilités. Filant la métaphore climatique, elle signe un récit tout en douceur pour mieux raconter ce déséquilibre temporaire qui s’installe dans la vie de son héros. Porté par ses grands-parents, accompagné durant ce passage orageux, il appréhende pour mieux la comprendre, la vie un peu bancale d’une mère qui a besoin elle aussi d’apprivoiser ce mal qui la ronge. Leurs échanges sont forts d’une complicité salvatrice qui les soude dans cette épreuve. La place de la famille, du dialogue et de l’échange franc et sans fard témoignent sans conteste que tous les sujets peuvent allégrement être abordés en littérature jeunesse…

Julie Guillem apporte ses touches grisées et lumineuses pour illustrer ce petit roman vraiment intelligent. Le trait épuré s’abstient de toute fioriture: des contours sans encrage, des couleurs vives pour les jours avec, sombres pour les jours sans, un petit côté vintage paradoxalement très moderne… Un regard qui ne s’offre pas la fantaisie et la poésie de la métaphore et un choix d’illustrations finalement très terre-à-terre pour une histoire de nuages qui attendent les jours plus doux… Une approche graphique qui marque et incite à suivre cette artiste.

Un petit roman à lire en attendant les éclaircies.

En écho à cette lecture sur le blog: Nuage d’Alice Brière-Haquet & Monica Marengo

J’ai suivi un nuage – Maëlle Fierpied

Illustrations Julie Guillem

École des Loisirs

Collection Neuf

84 pages /12€50

Dès 9 ans

17 janvier 2018

 

12 réflexions au sujet de « J’ai suivi un nuage – Maëlle Fierpied & Julie Guillem »

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