
Un prénom en exergue, une référence à Carnation de Xavier Mussat, un titre qui me rappelle combien j’aime d’amour les chansons de Pierre Lapointe… L’achat d’un roman ne tient parfois pas à grand chose et avant même que je plonge dans cette source de jolis mots, tous ces « petits riens » laissaient déjà entendre que nos sensibilités cohabiteraient sans nul doute au fil des pages.
Chaque premier jour de vacances, c’était le même miracle qui recommençait.
Jeanne rayonne de jeunesse et va éclore en plein cœur de l’été. Les vacances chez sa grand-mère ont pris une saveur qui a le goût de l’autre et porte le doux nom de Lucas. D’une amitié complice naissent des sentiments chaque fois plus intenses, chaque jour plus grisants. Son cœur explose et seul ce garçon qui écoute Brel et Barbara trouve grâce à ses yeux. Lentement, les sourires se taisent, les yeux murmurent et les mains se frôlent : comme le plus précieux des trésors, les nuits deviennent le refuge d’un amour fait de silences et de corps qui tremblent. Leurs étreintes amoureuses donnent l’illusion d’être uniques et de n’appartenir qu’à eux.
On avait fait le tour des mots. Je crois. Ma peau réclamait sa peau, à présent. Ça devait faire un boucan énorme.
Jeanne redécouvre alors son corps loin des liaisons mécaniques et explore avec passion chaque territoire de peau, chaque soupir, chaque frisson. Inutile de songer à la fin de l’été qui arrivera bien assez vite. Inutile de faire appel à la raison quand l’insouciance vous transcende et nourrit votre raison d’être. Il faut pourtant quitter Lucas car le mois de septembre la réclame insidieusement. L’été prochain semble si loin et cette force qui les a si souvent unis en silence pourra-t-elle survivre à l’absence?
L’année suivante, lorsqu’août commence à s’éteindre, Jeanne s’offre un retour surprise auprès de ses amis. Lucas si proche, à quelques souffles d’elle, n’a pourtant jamais été aussi loin. Un séisme sentimental la bouscule et l’éviscère. Son cœur s’emballe comme un écho ironique à un autre battement qu’elle contient, niché là, en secret.
Il fallait juste lui laisser ce temps-là. Ce temps qu’il mettait dans toute chose, quand il parlait, quand il regardait. Le temps d’aller fouiller dans son cœur. Quand on accepte de l’ouvrir, de regarder dedans, sans avoir peur.
A travers le récit éclaté d’une héroïne qui se perd, Madeline Roth couche sur le papier les troubles d’une jeune femme dépassée par ses émotions, malmenée par ce sentiment dont on ternit trop facilement la noblesse. Dans l’innocence brisée d’un été, la belle Jeanne crache sa colère, hurle ses douleurs, vomit ses désillusions. De la déclaration passionnée au complexe apprentissage du désamour, ses pensées confuses sont aussi le cheminement d’un renoncement, l’acceptation de laisser derrière soi, cette part d’adolescence ou cette part de nous qu’on s’est vu un jour contraint d’abandonner.
Si l’écriture de Madeline Roth m’a parfois semblé saccadée, s’accrochant comme une griffe hésitante sur le papier, elle transcrit finalement à merveille le malaise et le phrasé de cette héroïne qui s’essouffle et qui peine à respirer tant la douleur l’étreint. Voilà un auteur qui sait parler de l’adolescence avec beaucoup de force (comme Cathy Ytak, Thomas Scotto ou Antoine Dole…) Ainsi, cette source bien gardée dont nous tournons les pages est aussi celle qui a nourri ces larmes qui glacent, ce sang qui afflue en nous, poussé par le désir ou la colère, ces soupirs de souffle chaud qui vous rassurent ou vous délaissent, le tout murmuré au lecteur avec une justesse rare et délicate et son lot de clins d’œil – de de Beauvoir à Miyazaki – qui me parlent terriblement. Bravo, mais surtout merci Madeline.
Pour vos oreilles, évidemment, Monsieur Pierre Lapointe…
Madeline Roth – A ma source gardée
ISBN: 9 782364 745582
59 pages / 7€20
ça me tente bien!
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J’espère que tu apprécieras.
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voilà qui semble bien alléchant 🙂
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C’est un très beau texte qui vaut qu’on s’y attarde.
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Je ne peux as résister, quand j vois le nom de Pierre Lapointe, je cède par avance (j’ai encore la musique de son dernier concert qui résonne à mes oreilles.)
C’est donc une excellente raison de te lire, de suivre ton conseil et de céder à Madeline Roth 🙂
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J’ai des « phases Pierre Lapointe ». Je l’écoute en boucle, je connais ses textes par coeur. Je rêve d’assister à un de ses concerts au piano.
Et ce texte, j’espère que tu y seras sensible comme moi.
Merci pour ton passage ici.
Au plaisir.
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« Son cœur explose et seul ce garçon qui écoute Brel et Barbara trouve grâce à ses yeux. » Ceci est un très bon argument – comme tout le reste de l’article. Il y a de fortes chances que je cède.
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J’ai aussi craqué pour toutes ces références qui sont aussi les miennes… Identification mon amour. 😉
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Acheté au salon du livre. Yapluka et tu me donnes envie de m’y plonger au plus vite !
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Enjoy dear.
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Me voilà tentée également.
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Une très belle histoire sur l’adolescence dans ce qu’elle a de plus dur et mouvementé. La vie. Aussi.
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Un titre inspiré de Pierre Lapointe, voilà qui n’est pas banal et qui suffit à me convaincre ! J’essaierai de le trouver… Merci 🙂
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Me voilà ravie de lire ici le commentaire d’un amateur de Pierre Lapointe. Bonne lecture Profplatypus.
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Oui en effet même auteur que L’été de Léa . Je vous le conseille d’ailleurs. Un beau moment de lecture bien tendre. Merci sinon de votre passage sur mon blog. Je vais noter quand à moi ce livre de Madeline. Bon week-end de Pâques !!!
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Les thèmes de ce roman sont universels, on pourrait bien les retrouver dans un roman adulte. Et moi, c’est thèmes me parlent.
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Les mots toucheront adultes comme ado. C’est assurément une des forces de ce roman.
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Il m’attend, je sens que ça va me plaire !
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Je viens de découvrir ton blog, et tes chroniques donnent envie de lire beaucoup de livres ! Je pense qu’à l’avenir je les suivrai beaucoup plus !
Là aussi, merci pour la découverte, un peu moins pour ma wish-list !
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je viens de finir ce roman qui m’a touchée plus que de raison et j’adore ton billet.
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Oh ! Ton commentaire dormait dans mes « indésirables ». Voilà qui est réglé.
C’est plaisant de te lire ici chère Lucie. Et merci.
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