BD de la semaine·Et mon coeur fait boum·Neuvième art

La Route – Manu Larcenet (D’après le roman de Cormac McCarthy)

Des bulles aux pages

Il y a peu, je découvrais le roman de Cormac McCarthy et pénétrais dans un univers de dévastation qui rendait presque la mort préférable. Entre ces pages, un axe: la route, ruban d’asphalte, ligne qui tend vers un horizon qui ne laisse qu’un espoir aussi furtif qu’insaisissable pour un père et son fils en perdition. Et voilà Manu Larcenet qui s’est emparé de ces pages-là.

Réfléchis à ce que tu mets dans ta tête, parce que ça y restera pour toujours.

Avec le talent qu’on lui connaît, il nous entraîne auprès de ses protagonistes qui tentent par tous les moyens d’échapper à la résignation. Dès la première planche, nous sommes enveloppé·es de poussière et de cendre, laissant croître en nous cette douloureuse certitude que la lumière et le beau n’ont plus lieu d’être. Le noir et le blanc, nuancés par quelques atténuations grisées donnent le ton: ce monde-là n’est plus qu’hostilité et désolation.

Clair-obscur stupéfiant.

Quelle fascinante adaptation que cet album-là tant il semblerait que ce texte et ce trait devaient se rencontrer. Manu Larcenet nous livre ici des paysages qui jouent avec la perspective et les reliefs. On s’y sent volontairement à l’étroit puisque l’idée même d’avenir n’est plus envisageable. Ses cases – souvent silencieuses – sont pourtant gorgées de bruits, de craquements, de respirations, de tensions électriques qu’il donne à voir ou entendre. Si l’on a l’impression que le temps semble suspendu, c’est un leurre. Il passe, irrémédiablement et ronge avec férocité chaque parcelle de vie, creuse les visages crispés de sillons précoces, use les corps ravagés par la faim. Face au manque et à la perte de tout ce qui réjouit ou console, certaines planches éveillent nos sens et redonnent à nos perceptions une autre dimension. L’on se surprend à rester sur nos gardes et l’on enfouit, au plus profond de nous, cet espoir tenace qu’une échappée salvatrice pourrait exister. Du grand Larcenet.

Échos et prolongements:

La Route – Manu Larcenet – D’après le roman Cormac McCarthy
Éditions Dargaud
 28,50€ /160 pages / 202
4
BD de la semaine / 9e Art / Adaptation BD

 

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Et ce mercredi, les chroniques de la BD de la semaine sont au milieu des livres…

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Eimelle                                    Cristie                                 Natiora                             Gambadou    

 

Antigone                               Blandine                                   Nath                               Mylène

22 réflexions au sujet de « La Route – Manu Larcenet (D’après le roman de Cormac McCarthy) »

  1. Cette adaptation de toute beauté est victime de son succès : elle est déjà épuisée (et sûrement en réimpression donc) ! Je vais devoir me montrer patiente …

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  2. Je dois me l’acheter mais oui apparemment les librairies ne sont pas toutes traitées de la même manière. Les grands éditeurs ont une manière étrange de soutenir la librairie indépendante … Bref, quand je pourrai, je l’achèterai 🙂

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  3. Lu le roman, pas franchement emballée par l’histoire (même si je reconnais sans souci le talent et l’écriture de McCarthy). Par contre, je lirais bien cette adaptation, car j’avais été bluffée par celle qu’avait réalisé Larcenet du Rapport Brodeck, absolument formidable.

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