Neo Forest 1- Cocto Citadelle – Fred Duval & Philippe Scoffoni

Cocto Citadelle est une de ces cités parvenue à dépasser les désastres écologiques ayant ravagé la planète. Grâce à une maîtrise pointue des nouvelles technologies et des manipulations génétiques, les habitants de la nouvelle Terre ont réussi à retrouver une forme de sérénité autrefois perdue. Néanmoins, la vie – hiérarchisée à l’extrême – ressemble en bien des points à une société féodale d’un nouvel ordre. À sa tête, l’omnipotente famille Cocto. La rançon d’un tel statut est de faire bien des envieux·ses et la tentation du complot menace insidieusement l’équilibre politique en place.

Les Hommes ont par le passé généré des abominations qui parfois reviennent des ténèbres sans prévenir.

Lors d’un tournoi qui rappelle les joutes chevaleresques, le comte Cocto est gravement blessé et se voit contraint d’être isolé dans une cellule permettant à ses organes vitaux touchés de se régénérer. Sa fille, Blanche, censée gouverner en attendant le rétablissement de son père manque hélas à l’appel. Loin des ambitions et des préoccupations familiales, cette dernière ne jure que par les escapades interdites et se moque allégrement des responsabilités qui pèsent sur ses épaules. L’occasion rêvée pour les dissidents de l’ombre, les hypocrites avides de pouvoir, les comploteur·ses ingénieux·ses de se laisser aller à rêver de renverser l’ordre établi.

Au croisement des genres, cette BD mêle avec une justesse des plus agréables les codes des récits post apocalyptiques associés aux luttes de pouvoir d’une autre époque… Les intrigues se tissent et laissent entendre que la lutte sera faite de vils coups bas. Si l’on peut parler de SF, la nature foisonnante naissant sous les crayons de Philipe Scoffoni a ici clairement pris le pas sur les habituels paysages saturés de gris et de ferraille propres aux mondes régis par les nouvelles technologies. Conformément à ce genre d’histoire, le scénario soulève évidemment des réflexions d’ordre moral sur les bienfaits et les dérives d’un monde comme celui-ci, mettant en exergue la classique opposition entre certains personnages incarnant ce renouveau et d’autres plus nostalgiques d’un passé révolu…

Je crois que la forêt ne veut plus des Hommes et qu’elle apprend à tuer.

Au cœur de ce premier opus des plus convaincants, l’idée d’une nature indomptable qui n’a pas dit son dernier mot, prête à tout pour affirmer sa toute puissance. Le danger rôde, et la forêt impassible laisse croître en son sein la plus grande des révoltes silencieuses. Lianes tentaculaires, arbres diaboliques et maudits, végétaux prêts à diffuser leurs effluves vénéneux et mortifères… Gare à celles et ceux qui oseront se croire au-dessus d’elle.

Prolongements littéraires

 

• Sirius – Stéphane Servant
• Nous sommes l’étincelle – Vincent Villeminot
• Et toujours les forêts – Sandrine Collette
• Dans la forêt – Jean Hegland

Et cette fois-ci, les chroniques de la BD de la semaine sont à retrouver chez Fanny.
Rendez-vous mercredi prochain chez ici même !

Chez Fanny.

Neo Forest – 1- Cocto Citadelle – Fred Duval & Philippe Scoffoni Éditions Dargaud 16,50 € / 64 pages / 2023 BD de la semaine / 9e Art / Progrès, rêves et dérives scientifiques