
On ne gagne pas sans l’appui du diable dans son pantalon.
Elles vivent en recluses. Probablement enfermées, délaissées, abandonnées, cloîtrées par des pères soucieux de les voir entre quatre murs. Dans ce pensionnat, elles cohabitent. Corps et âmes. Elles sont le feu, le désir, la colère, la violence, la folie. Elles prennent tour à tour la parole dans un roman polyphonique qui ressemble plus à de petits monologues qui ne font pas toujours sens à la première lecture. Dès lors, des personnalités se dessinent, des portraits sont esquissés.
Ma plaie entre les jambes ne se cicatrisera jamais. Reviendra chaque mois. Être une femme est une blessure.
Du fond de cette forêt s’échappent les mots obscurs et troubles. Parfois incantations, parfois prose énigmatique, les paroles prononcées enrobent le pensionnat d’une aura insaisissable et étrange, laissant aussitôt planer un mystère et surgir toutes les hypothèses inimaginables au sujet de ces filles-femmes qui grandissent loin des autres.
Tout dans ce texte d’Ariane Lessard était là pour me plaire et me rendre captive d’une fable ensorcelée furieusement incandescente et révoltée. Mais ce fut malheureusement l’effet inverse. Le roman choral doit – pour fonctionner – parvenir à être brillamment construit. Or quand l’implicite et le sous-entendu sont au cœur des prises de parole de ces femmes exclues un peu sorcières, le récit se voit fragilisé, moins puissant car trop engoncé dans son carcan embrumé et nimbé de mystère.
Je ne veux pas que l’on sache sur moi des choses que je ne sais pas.
Syntaxe éclatée, ponctuation évaporée : la parole devient une urgence que la langue ne parvient plus à cadrer. Déconstruite, la phrase surgit et tente d’exister dans un tourbillon de mots qui peinent à se charger d’une puissance émotive. Cette froideur narrative – décalée et absurde, empreinte d’un malaise ambiant face à ces femmes dont on sait finalement peu de choses – prend un peu trop le dessus sur l’originalité du texte, me laissant bien trop en retrait et perplexe pour pouvoir en apprécier la supposée force cachée.
Les dames empêchent la nouveauté en gardant toutes les filles encadrées, encerclées et obligées. Moi je ne suis pas une personne qu’on peut enfermer.
À lire (plutôt):
L’Année de Grâce – Kim Ligget
École pour filles d’Ariane Lessard Éditions La Ville brûle 14€ / 144 pages / 2022 Dystopies – Femmes – Destin de femmes
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cela fait plusieurs billets que je lis sur des blogs différents qui parlent de déceptions de lecture. Tant mieux pour mes listes que je n’arrive pas à réduire.
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Je suis déçue 😅 je me faisais une joie de me le procurer. Je vais revoir mon envie.
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Mon avis n’engage que mon ressenti mais je ne suis clairement pas la bonne personne pour défendre ce texte.
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Dommage.
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