Lorsque Christine fait la connaissance de Claude, ce dernier passe la majeure partie de son temps à errer du côté des Halles (Le Ventre de Paris) ou dans son atelier parisien. Le côté impromptu de cette rencontre prend une tournure que l’on devine aisément et donne un charme certain à la situation. Progressivement, un rapprochement opère, Christine acceptant même de poser pour l’artiste. Amoureux transis, ils décident ensuite de s’installer à la campagne et s’éloignent des pavés parisiens. Cette vie au grand air manque hélas d’effervescence et le retour vers la capitale a des allures de chape de plomb qui pèse sur les épaules de Christine tant elle aimait sa vie loin du tumulte de Paris. Néanmoins, si le sacrifice rend heureux Claude, pourquoi hésiter plus longtemps?
Il était tombé dans un de ces doutes qui lui faisaient exécrer la peinture, d’une exécration d’amant trahi, accablant l’infidèle d’insultes, torturé du besoin de l’adorer encore […] Quand une de ces crises le détraquait, il n’avait qu’un remède : s’oublier, aller se prendre de querelle avec ses camarades, marcher surtout, marcher au travers de Paris, jusqu’à ce que la chaleur et l’odeur de bataille des pavés lui eussent remis du cœur au ventre.
Retrouver Paris c’est se mêler à nouveau à ses compagnons artistes. Sandoz – double zolien par excellence -, Dubuche – architecte de son état -, Fagerolles – peintre s’inspirant un peu trop des travaux de son ami, Mahoudeau, sculpteur passionné… Ce joyeux groupe qui écume les troquets dans un entre soi qui rassemble autant qu’il isole ne cesse d‘alimenter les divergences qui agitent le monde de l’Art, s’inscrivant dans une mouvance traditionnelle ou cherchant à rompre avec les canons du siècle.
Les discussions vont alors bon train et les sélections dans les salons rythment les temps forts de leurs vies d’artistes. Au fil des années, le cercle d’amis goûte aux joies de l’embourgeoisement et se réjouit – faussement et non sans jalousie – des succès des uns ou des autres. Alors qu’il se démène pour son Art, Claude n’en demeure pas moins très peu remarqué et son talent ne fait guère l’unanimité. Allant de déceptions en déconvenues, le peintre autrefois plein d’allant perd lentement de sa superbe et son regard s’éteint à mesure que son ambition – sérieusement mise à mal – décline.
Le passé n’était que le cimetière de nos illusions, on s’y brisait les pieds contre des tombes.
Ah ! c’était bien la fin, elle n’était plus, il n’aimait plus en elle que son art, sa nature, la vie. Et, les yeux au loin, elle gardait la rigidité d’un marbre, elle retenait les larmes dont se gonflait son cœur, réduite à cette misère de ne pouvoir même pleurer.
Un texte qui aurait marqué la rupture amicale entre Zola et Cézanne. Faut-il voir dans le binôme Sandoz et Claude les fantômes de leur amitié, les tâtonnements, démons et les doutes de ces protagonistes un peu trop proches de leurs considérations intimes ? Je vous conseille à ce sujet, l’article du site En attendant Nadeau qui remet en perspective les rumeurs littéraires et les correspondances des deux artistes pour éclairer un peu plus le débat.
Prolongements littéraires:
- Tout ce qui touche à Zola-mon-amour sur une page du blog : Les Rougon-Macquart
Cette semaine, la saison 2 des classiques c’est fantastique s’achève après une année de chroniques et de partage avec tous les participant·es. L’idée était donc de mettre un siècle de notre choix à l’honneur et je ne pouvais faire autrement que de consacrer mes chroniques au XIXe que j’aime tant. (Le XVIIe aurait toutefois pu être de la partie.)
Allons découvrir le choix de Fanny et les chroniques de Lili / Mag / Lolo / Pati / Mumu / L’Ourse bibliophile / Madame Lit / Alice / Katell /
C’est aussi le 5e titre lu pour le challenge en sortir 22 en 2022.
Et puisque – de toute évidence – nous apprécions follement ce RDV, nous signons pour une nouvelle saison dont je vous parle ici. Vous jouez?
L’œuvre d’Émile Zola Éditions Gallimard – Collection Folio classiques 6,50 € / 357 pages / 1886 Les classiques c’est fantastique ! / On a une relation comme ça E.Zola et moi |
Zola forever ❤
J'étais persuadée que tu allais te réserver cette lecture pour le thème de l'Art 😉
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C’était prévu mais comme entre temps j’en ai trouvé d’autres… Ça collait parfaitement à mon XIXe siècle chéri !
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Un de mes Zola préférés, évidemment ❤️
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Ce tome fait partie des deux-trois que j’avais lu dans mes années lycée (avant de décider de tout reprendre du début quelques années plus tard), mais j’en garde un excellent souvenir. Flou, mais captivant dans ce lent désenchantement !
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L’art zolien inégalable de raconter la déchéance.
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Comme Vanessa, je pensais que tu allais sortir celui-ci pour le thème sur l’art, tu es décidément plein de surprise 😀
Il faut ABSOLUMENT que je continue mon exploration de son oeuvre.
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C’eût été un poil trop prévisible tu penses bien ! 😁 Et tu dois effectivement ABSOLUMENT poursuivre ta lecture des Zola. C’est indiscutable.
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Les lectures de ce/notre cher Zola seront au programme de cette année 😉
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Les occasions seront données effectivement !
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Décidément Zola a été choisi par beaucoup et le XIXème siècle également….. Vous m’avez tou(te)s convaincue de me lancer dans l’oeuvre de cet écrivain, La fortune m’attend espérons qu’elle va m’enrichir d’un nouvel auteur classique que j’ai longtemps écarté 🙂
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En même temps, quel meilleur peintre de son siècle ? 😉
J’avais beaucoup aimé La Fortune des Rougon : ça donner merveilleusement le ton de ce que l’on trouvera dans la saga. Bonne découverte 🙂
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Je n’ai lu que la fin de ta chronique, j’ai placé ce roman il y a peu en haut de mes piles ( notamment pour cette relation Zola-Cézanne, à laquelle je me suis intéressée ces derniers temps, entre Lyon et Aix en Provence ).
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D’office qu’il fallait clôturer la saison avec un Zola ! 😉
Tu donnes terriblement envie de découvrir celui-ci [et le côté potin mondain m’attire encore plus].
J’ai hâte de retrouver Claude, j’avais beaucoup aimé ce personnage, mais ce n’est pas pour tout de suite [sauf si je décide de déroger à ma règle, mais ce serait mal !]…
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Je n’ai pas encore commencé mon exploration de cet immense écrivain… Il va bien falloir.
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Oh mais oui ! Tant de belles heures de lecture t’attendent ! Quelle chance !
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Je n’en doute pas! 🙂
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Zola, forcément ! 😉 Je vais essayer de m’en programmer un dans cette nouvelle saison. J’avais dit un par an un jour…
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Il faudrait vraiment que je renoue avec cet auteur qui m’avait fait forte impression il y a quelques années.
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