À croire que l’été nous laisse le temps de penser à grandir.
Un oui. C’est presque rien. C’est même franchement facile à prononcer quand on y pense. Mais ce oui-là n’a pas l’évidence qu’on veut bien lui prêter. Ce oui-là, si bref, lacère, tranche dans le vif, scelle un adieu.
Allongé sur son lit d’hôpital, Alban ne peut entendre ce fameux oui. Mort cérébrale, verdict sans appel. Autour de lui, sa sœur et sa mère voient leur rapport au temps bouleversé. De l’autre côté de la porte, médecins et infirmières attendent, surgissant entre pudeur et fermeté face au temps qui (op)presse, leurs pas comme les secondes d’un décompte insoutenable. Il faut pourtant choisir. Et peut-être donner une réponse de vie, d’espoir en acceptant la mort d’un fils.
Parce que ce puzzle sans solution, c’est le corps de son fils. Mon frère.
Entre quatre murs, les heures sont interminables. Et face à ce chaos irrespirable, face à la vie qui s’est déjà échappée sans faire de bruit, Anouk réveille par petites touches fragiles, les souvenirs de moments doux. La vie murmurée, soufflée, libérée. À travers ses mots, le portrait d’un frère intrépide puis d’une famille se dessine et l’amour délie les langues, laissant surgir des sourires. Malgré tout. Shéhérazade éphémère, elle fait de sa mémoire de sœur une ultime tentative de persuasion face à une mère brisée, difficilement en mesure d’accepter la violence de la situation. Comment faire vite – et sans brusquer – dans ce déchirement d’émotions et de chagrin?
Les souvenirs ne gardent personne en vie? Je vais tenter de faire que oui.
Voilà que Thomas Scotto fait son entrée dans la collection Court Toujours de Nathan. Voir cet auteur se frotter à un sujet tel que le don d’organes, c’est assurément tourner les pages avec la certitude d’en sortir durablement touché·e·s (notez l’euphémisme). Il vous livre ici un texte rare, à la fois délicat et percutant. Chaque mot y est soupir, battement de cœur en sursis. De ces livres dont la beauté se mesure au grand nombre de pages cornées. Un indispensable sur le sujet tant il est brillamment traité. Avec cette manière assez incroyable de saisir la douceur du détail, avec cette minutie à capter l’extrême sensibilité du réel, avec cette acuité à dire l’autre au fil des pages et entre les lignes. Sublime.
Moi, je me sauverai sûrement plus tard. De ma colère, de la peur.
Thomas Scotto au milieu des livres : Ma tempête de neige / Kodhja / Dans un brouillard de poche
Prolongements littéraires:
- Réparer les vivants – Maylis de Kerangal ♥
Quelques secondes encore de Thomas Scotto Éditions Nathan, collection Court Toujours Texte disponible également en version audio et numérique. 8€ / 64 pages / 2021 Que jeunesse se fasse – Texte court |
Noukette et Jérôme avaient été touché.es (euphémisme aussi) et je m’étais empressée de noter ce titre. De ce thème, je pense n’avoir lu que « Réparer les vivants » (♥)
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En effet comment ne pas penser au roman et film Réparer les vivants….. 🙂
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J’ai vraiment aimé les deux. Touchée / Coulée.
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Et qui fait se poser des questions….. Et nous que ferions nous ? 🙂
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Réparer les vivants … cette merveille. Peut-on faire mieux sur un sujet aussi sensible, j’ai des doutes …
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Faire mieux je ne sais pas, mais différemment et beau oui.
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Je retiens ce titre alors.
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Oh oui. Indéniablement.
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Un thème qui ne peut pas laisser indifférent, c’est sûr. Je note !
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Un sujet qui me tient à coeur…
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