Sous la peau de bête et la cendre, le visage immaculé d’une beauté qui vient d’éclore. De l’enfance à l’adolescence, de la jeune fille à la femme, c’est tout un monde nouveau qui naît et surgit face aux regards des autres. Des yeux admiratifs, des yeux envieux, des yeux fiers, des yeux amoureux.
Dans un tendre cocon, dans un royaume prospère, un drame survient. La mort d’une mère tant aimée et la promesse d’un homme faite au chevet de son épouse. Une promesse pleine d’espoir, de mieux aller, de renaissance. Quand le deuil et la douleur cesseront de tourmenter le Roi, la sérénité reviendra à travers une nouvelle Reine.
Mais derrière cet engagement-là – et la furieuse envie d’y être fidèle – surgit l’impensable. Que faire, quand dans l’esprit du père chéri, naît l’inacceptable? Comment réagir quand le visage paternel rassurant se pare d’un masque de monstre? Ma fille, je vais vous épouser. Les mots sont ainsi prononcés et avec eux, l’innocence arrachée.
Tous furent pris de doutes et de malaise, mais personne ne dit mot.
Cette histoire-là, vous la connaissez. La fuite, salvatrice, suggérée par la figure féminine de la marraine qui rappelle quel interdit ne saurait être bafoué quel qu’en soit l’enjeu. L’exil pour mieux renaître au cœur de la forêt. L’autre homme comme un gage de confiance qui se gagne dans un jeu amoureux savamment orchestré.
Comment allait donc finir cette histoire cruelle?
Cécile Roumiguière s’empare ainsi d’une histoire ayant traversé les plumes et les siècles. Ses mots ont à la fois cette musicalité des contes traditionnels tout en apportant une singularité moderne dans le ton qui perpétue une tradition littéraire sans la dénaturer ni l’imiter pâlement. À la voix qui narre se mêle la voix d’un chœur populaire – rappelant le théâtre antique – qui entretient le déni et dédramatise l’intolérable dans un terrible aveuglement.
Elle y glisse également, toute l’influence délicieuse de Jacques Demy (les lecteurs auront tous en tête la chanson culte du cake d’amour lors des préparatifs de la brioche des amants) et l’on appréciera d’y saisir, de temps à autre, des notes plus légères sans pour autant négliger le grave ni oublier que le message met en garde sur une envie abjecte et criminelle.
Un premier album fait d’ombres et de lumières mêlant les tons charbonneux et les traits dorés d’Alessandra Maria. Les portraits mystérieux ont quelque chose des tableaux de la Renaissance italienne que l’on aurait fusionnés aux volutes dorées si caractéristiques de la Sécession viennoise. Ajoutez à cela une touche qui rappelle aussi les œuvres picturales symbolistes aux corps figés, prisonniers des motifs floraux ou végétaux comme on l’est d’une somptueuse malédiction. Les illustrations – comme les mots – sont hypnotiques pour un message hélas encore cruellement d’actualité. À (re)lire impérativement.
Parfois, il faut savoir fuir ma fille.
Le site d’Alessandra Maria: ici
Cécile Roumiguière au milieu des livres: Hector et les bêtes sauvages / Les Filles de la Walilü / Parole de papillon / Sur un toit, un chat. / Mon chagrin éléphant / Rouge Bala / Le fil de soie.
Peau d’Âne Texte de Cécile Roumiguière, illustré par Alessandra Maria Éditions Albin Michel jeunesse 19,90 € / 64 pages / 2019 Les classiques c’est fantastique / Famille je t’aime, famille je te hais! |
Je ne connaissais pas cette illustratrice… C’est superbe ! (et encore le mot « superbe » n’est peut-être pas encore assez fort…)
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C’est son premier album et c’est je dois dire une très belle révélation!
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j’ai toujours détesté ce conte quand j’étais jeune, on ne me l’a pas raconté enfant , je pens eque mes parents n’aimaient pas non plus cette histoire d’inceste.
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Je n’ai jamais aime.moi non plus ce conte, je pense qu’avec l’age je serai plus sensible et les illustrations sont magnifiques…
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Je n’aime pas du tout ce conte que je trouve particulièrement glauque mais l’album à l’air bien alors pourquoi pas.
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Il a l’air magnifique !
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J’aime beaucoup le trait ! C’est splendide !
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Difficile d’u être insensible en effet!
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