[…] C’était l’idée qu’on se faisait d’une putain de belle aventure.
L’échappée désenchantée
Clarence est admiré de tous et ses amis semblent succomber tant à son charme qu’à son magnétisme. Mais c’est pourtant son corps inerte qui flotte près du bateau ce jour-là à des kilomètres des côtes. Qui aurait pu croire que leur escapade irlandaise sur cette mer qu’ils chérissent tant les conduirait rapidement à compter un membre de moins au sein de cette fine équipe en apparence si soudée?
À l’échelle d’une vie, j’imagine que cette rupture intérieure peut ressembler à un détail. Pour moi, c’était toute une partie de mon monde qui s’écroulait, et ça faisait un mal de chien.
Emma, Elise, Sam et Victor. L’un d’eux est nécessairement coupable. Mais avant même que la parole n’attaque, ne dénonce, ne morde, un danger plane. Non loin de là, la tempête gronde et s’apprête à dévorer ces amoureux du grand large. Dès lors, la survie à tout prix maintient l’équipage à cran, sous tension. Et si le Céladon à la dérive n’a d’autre avenir que le naufrage, la véritable débâcle est celle de leur amitié, en perdition.
Le calme ne dure pas, le vent forcit encore. On sent comme un sursis avant qu’il se déchaîne.
Un thriller au goût de sel
À chaque retour de Manon Brunet dans le paysage littéraire, l’impatience s’empare de mes nerfs de lectrice. Pour ce nouveau titre, inspirez profondément car les moments de répit seront rares. Vous ouvrirez le roman et embarquerez aussitôt. Pleine mer, vagues et orages. Rien ne vous sera épargné. La plume de l’autrice sait une nouvelle fois parfaitement rendre compte des chaos silencieux et intérieurs qui brisent ses héro·ïnes. L’espoir d’une accalmie n’est rien d’autre qu’un leurre et les eaux sombres et salées seront un danger de tous les instants. Et il en faudra, de la ténacité, pour faire face à cette immensité qui peut vous arracher la vie sans le moindre effort, avec une brutalité déconcertante. Cinq amis au départ. Mais combien, à l’arrivée?
Je le regardais d’en bas, le trouvais beau et brouillé – un papier chiffonné.
C’est un huis clos mouvant que signe ici Marion Brunet. Et prenez garde, la nausée pourrait bien vous nouer l’estomac et vous donner quelques sueurs froides. Avec son acuité à dire le monde adolescent, elle nous entraîne partout et surtout là où l’on ne l’attend pas, insufflant à ses récits un souffle cinématographique captivant. Psychologie des personnages, rancœurs et jalousies latentes: tout y est dit avec une sensibilité tranchante. La mort de Clarence ne serait-elle pas finalement qu’un prétexte, une occasion de gratter enfin le vernis qui masque les liens supposés indéfectibles? Dès lors, l’on ne désire qu’une chose ardemment: apercevoir la terre ferme, et espérer que les personnages la frôlent sans se laisser engloutir par leurs propres terreurs.
Marion Brunet au milieu des livres : Vanda / Frangine / La Gueule du loup / Sans foi ni loi / L’Été circulaire
BO des pages tournées : La marée haute – Lhasa
Plein Gris de Marion Brunet Éditions Pocket Jeunesse 16.90 € / 195 pages / 2020 |
Quoi de mieux qu’un bateau dans la tempête pour révéler des caractères. Et prendre ce cadre pour imaginer un thriller est une bonne idée.
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Très belle chronique qui résume parfaitement cet excellent roman!
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J’ai tellement aimé Vanda, il faudrait que je me penche de plus près sur ses romans jeunesse !
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Tentatrice, va ! Je le lirai sans nul doute !
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Mince, ça me fiche la trouille !!
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Ce que j’aime ce type d’histoires ! Les huis clos sont faits pour moi. Je me penche très rarement du côté de la littérature jeunesse et pourtant, on y trouve de très belles choses.
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Moi j’ai de plus en plus de mal à faire sans!
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J’aime cette auteure, je vais continuer à explorer son univers
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Idem. Il m’en reste un ou deux à lire et j’adore à chaque fois !
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Heureusement qu’il fait moins de 200 pages tellement on le lit en apnée !!
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