Le vent tue. L’avez-vous vu? Il existe pourtant.
Si les chats noirs sont porteurs de mauvais présages, celui du narrateur s’échappe un matin en délaissant le bureau douillet de son maître. Inquiet, il parcourt la forêt à la recherche de son animal de compagnie. La veille de cette fugue, un petit oiseau pénétrait affolé dans ce même bureau pour retrouver – non sans mal – sa liberté. Tantôt, la maison de maître semble avoir quelque chose de magnétique, tantôt elle semble être un lieu à fuir à tout prix.
Quand je rentre, il y a cette inquiétude qui s’empare de moi. Comme si quelque malheur m’attendait chez moi. Que vois-tu que je ne vois pas?
Le propriétaire du domaine n’échappe pas à son lot de tourments, souffrant de fièvres qui le contraignent régulièrement au repos. Épuisé et malade, ses nuits sont synonymes d’angoisses douloureuses qui gagnent en intensité. Ses inquiétudes deviennent craintes, ses craintes deviennent frayeurs au point d’inviter dans ses nuits agitées des hallucinations et des visions cauchemardesques. Très vite, le doute s’empare de cet homme qui ne se sent plus seul chez lui et refuse – face à tant d’invraisemblables phénomènes – de mettre cela sur le compte de la folie. Mais comment justifier l’inexplicable quand le plus cartésien des esprits perd ses repères face au réel qui vacille? Malgré toutes les terreurs paralysantes qui le hantent, il semble prêt à affronter cette force qui a pris possession de sa maison ou de son âme…
Et ce sont des réponses qui n’amènent que d’autres questions aux dimensions plus abyssales encore.
S’emparer d’un texte du XIXe attise nécessairement – bien que tardivement – ma curiosité tant je suis une fervente lectrice de la littérature de cette époque. Le travail de Guillaume Sorel est un véritable hommage à l’œuvre de Maupassant qu’il réinterprète brillamment en trouvant le juste équilibre – entre fidélité et liberté – pour cette adaptation . L’on retrouve avec un plaisir évident les pinceaux de l’artiste et son goût pour l’aquarelle dans toutes ses nuances et subtilités. Ajoutons à cela, une approche graphique qui repose sur un jeu de contrastes qui structure le récit en soulignant toutes les tensions qui s’emparent du héros, tiraillé entre le réel et le frisson fantastique.
Les scènes de jour laissent entrevoir de jolis tableaux d’une Normandie lumineuse tant chérie par l’auteur qui fut le théâtre d’un grand nombre de ses nouvelles ou romans. Sorel y glisse également des clins d’oeil à des œuvres de grands peintres de l’époque, ce qui plaira aux admirateurs de Toulouse Lautrec, Manet ou Degas. Puis, quand la nuit tombe, les couleurs s’assombrissent radicalement. L’auteur délaisse alors le pastel pour une palette plus vive et obscure qui permet d’installer l’atmosphère fantastique si anxiogène pour le héros. Le corps du démon qui le hante semble sorti tout droit de planches anatomiques scientifiques ou d’un tableau d’écorché aux contours vaporeux et transparents – Le Cauchemar de Füssli n’est évidemment pas bien loin…
Friand de ces univers fascinants qui délaissent le réel pour mieux laisser surgir l’étrange et l’irrationnel, Guillaume Sorel était fait pour poser son regard sur l’œuvre de celui qui finit par être emporté par une folie dévorante. Un album qui scelle une très belle rencontre artistique qui se moque allégrement des siècles qui séparent les deux artistes.
Guillaume Sorel au milieu des livres: Hôtel particulier / Les derniers jours de Stefan Zweig
Le Horla Adaptation de la nouvelle de Guy de Maupassant Scénario et dessins de Guillaume Sorel Éditions Rue de Sèvres 15€ / 64 pages / 2014 BD de la semaine – Les classiques c’est fantastique- XIXe mon amour |
Les illustrations ont l’air sublime ! J’ai étudié le Horla en 4ème alods je suis tentée 🙂
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Elles font à mon sens toute la force de cet album!
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Magnifique album, sublime artiste que Guillaume Sorel ❤
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Je garde un souvenir marquant de ma lecture du Horla. Et j’avoue que lire son adaptation en BD me tente pas mal!
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Une intéressante adaptation on dirait ! 😉 Je note.
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Tout à fait ! Je la trouve très réussie.
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Qu’est-ce que j’ai aimé cette nouvelle. (Je suis fan de Maupassant!)
Retrouver cette histoire sous de si beaux traits est terriblement tentant.
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Très tentant!
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Très bel avis ! Encore jamais lu Le Horla de Maupassant (mais qu’est-ce que j’attends ! Surtout que jusqu’ici j’ai aimé toutes mes lectures de l’auteur – toutes lol ^^ J’en ai lu deux ^^). Cette adaptation BD me tente beaucoup aussi ! Les planches sont superbes !
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J’aime beaucoup ce texte et cette adaptation me fait saliver ♥
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J’aime beaucoup Maupassant mais je n’ai pas encore lu Le Horla. Cette adaptation semble très réussie!
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J’ai lu cet album il y a fort longtemps, à sa sortie je crois. Je n’en ai plus beaucoup de souvenirs, mais je me souviens que graphiquement c’est juste somptueux !
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je crois que je n’ai jamais lu Le Horla ……..
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Il n’est jamais trop tard !
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Je viens de découvrir Sorel et je suis fan de Maupassant depuis longtemps. Alors oui, je la lirai !
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Ça me paraît être un combo prometteur pour toi!
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Ooooooh je veux ça je veux ça je veux ça. Jadore le trait et je garde un souvenir très fort de la nouvelle.
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Elle est assez incroyable ! Et cet album rend bien compte de son atmosphère !
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Maupassant, souvenirs scolaires difficiles que j’aimerais exorciser. Cet album me semble parfait pour cela!
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Il est temps de commencer la thérapie !
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Une superbe BD pour un grand texte indémodable !
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Nous sommes d’accord !
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J’aimerais bien me procurer cette BD, curieuse de découvrir l’ambiance. J’ai lu le texte de Maupassant pour la première fois assez récemment.
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Alors ce sera un bel écho à ta récente lecture. Parfait pour un plongeon fantastique.
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