Celui qui engagera avec elle un concours de haine ne remportera pas facilement la couronne de la victoire.
Promise à l’exil, répudiée par son grand amour Jason qui lui préfère une couche royale et le trône de Corinthe, Médée n’a plus sa place sur les terres qui lui ont autrefois apporté leur protection en devenant son refuge. La voilà devenue colère, folle de rage et révoltée contre l’homme pour qui elle a tout sacrifié – jusqu’à son frère – égorgé sans le moindre effroi et sans un soupçon de culpabilité.
Aussi, avant d’être ta victime, je veux prendre mes précautions.
Telle une louve-lionne blessée, la voilà qui prépare son plan pour mener à bien sa terrible vengeance. Et pour toucher Jason, rien de plus fou que de l’atteindre par le crime le plus odieux qui soit. Médée l’infanticide, jalouse et rancunière ne recule devant rien. Elle fait de l’abject sa plus grande force et orchestre sa révolte comme on distille et propage le plus puissant des venins. Il suffira de tendre l’oreille et d’écouter ce portrait que le chœur antique tisse au fil de ses mots. Médée est redoutable… Qu’on se le dise…
Hais-moi, mais pars. J’ai en horreur l’odieux bruit de ta voix.
La pièce d’Euripide n’a peut-être pas la charge émotionnelle de la Médée d’Anouilh mais elle porte en elle les germes d’un texte fondateur qui nourrira indéniablement la fougue cette héroïne littéraire sans limite. Son discours, ancré dans l’époque antique, se révèle à la fois d’une grande modernité tout en se montrant, inévitablement, engoncé dans les traditions et les carcans archaïques. Le destin de la femme est ainsi soumis à l’autorité et au bon vouloir d’un mari mais Médée sait s’émanciper – avec cruauté – de cette emprise (et de sa douleur dévorante).
Elle se démarque par sa folie destructrice qui dévoile toute sa complexité d’épouse bafouée et d’une amoureuse éconduite, tiraillée entre son désir profond de liberté et sa furieuse dépendance à sa passion destructrice. Quelques répliques bien senties laissent ainsi entrevoir, comme l’on regarderait à proximité d’une porte entrouverte, celle dont la renommée et la réputation traverseront les siècles pour devenir l’une des figures les plus ambiguës – et les plus belles – de la littérature.
Je sais quels crimes odieux je m’apprête à commettre: mais la passion l’emporte sur ma raison et c’est elle qui cause les plus grands maux chez les mortels.
- Une chronique antique pour un rendez-vous mensuel Les classiques c’est fantastique organisé avec Fanny – Mes pages versicolores.
- Les chroniques des autres participantes : Alice / Paolina / Pati
BO des pages tournées : Jalouse – L
Mes chroniques autour du personnage de Médée en littérature:
- Médée de Jean Anouilh (que j’aime d’amour.)
- Le tome 1 de la série BD de Nancy Pena et Blandine Le Callet.
- Le tome 2 de la série BD de Nancy Pena et Blandine Le Callet.
- Le tome 3 de la série BD de Nancy Pena et Blandine Le Callet.
- Le tome 4 de la série BD de Nancy Pena et Blandine Le Callet.
- Médée d’Euripide.
- Médée de Sénèque.
- Médée de Corneille.
- Médée Kali de Laurent Gaudé.
- Médée de Max Rouquette.
- Médée la magicienne de Valérie Sigward
- Médée de Christa Wolf
- Beloved de Toni Morrison.
- L’Obscure Clarté de l’air de David Vann
Médée – Euripide Traduit du grec ancien par Pierre Miscevic Rivages poche, dans la collection Petite bibliothèque 9,65€ / 162 pages / 2013 (Pour la présente édition) Coup de théâtre – Médée au fil des siècles – Les classiques c’est fantastique! |
Quand on dit classique tu n’hésite pa à retourner aux sources . Bravo.
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Je suis assez friande de cette époque délaissée par les littéraires. Le manque de temps m’a empêchée de me consacrer à un pavé pour ce RDV…
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Mais as-tu encore des livres à découvrir sur Médée? 🙂
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Encore quelques uns en effet ! Et je les découvre toujours avec enthousiasme.
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Tous ceux qui ne comportent pas de « lien » dans ma liste (non exhaustive)
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A force de te ire en dire tant de bien de Médée, je ne pouvais pas ne pas la lire ce mois-ci. Et j’ai beaucoup aimé ! Maintenant je suis prête à lire les dérivés que je « m’interdisais » jusqu’à, par manque de pré-requis, comme le roman de David Vann par exemple. Et puis je vais lire cet Anouilh aussi, qui visiblement vaut le détour 😉 En tout cas, merci les filles, vous avez réussi à me faire lire (et aimer) de l’antique !
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Ouah, tu es une fan de Médée !
Antique pour moi aussi avec les Pensées de Marc Aurèle (2e siècle) sur https://pativore.wordpress.com/2020/09/28/pensees-de-marc-aurele/
Bonne continuation 🙂
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J’avoue que j’entretiens un rapport plutôt obsessionnel avec ce personnage. ^^
J’ajoute ton lien ! Merci Pati ! Fidèle au poste !
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L’antiquité et moi ça fait deux et pourtant j’ai une licence d’histoire… Octobre est trop chargé de mon côté mais je vais faire en sorte d’être de la partie pour le challenge en novembre et décembre 😉
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Je n’ai lu que la pièce de Sénèque (ce qui est déjà pas mal après tout) et je me souviens de la puissance dramatique de cette femme. C’était il y a six ans et mon souvenir de lecture s’est déjà estompé, vous lire toi et Alice me donne envie de la retrouver.
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c’est la première version que j’ai lue, et qui garde une place très forte pour moi! Un personnage qui n’en finit pas de questionner au fil des revisites du mythe!
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Je suis vraiment ravie d’avoir découvert la Médée originelle ! (Il était temps!)
Et je comprends qu’elle puisse garder en toi cette place si particulière qu’elle mérite.
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