BD de la semaine·Que jeunesse se fasse...

Sacrées Sorcières – Roald Dahl & Pénélope Bagieu

Quoi de plus effrayant que des histoires de sorcières racontées par sa grand-mère? Le héros de cette BD pourrait répondre sans hésiter: croiser – pour de vrai – ces terrifiantes femmes qui n’existent pas que dans les cauchemars ou les récits qui font trembler. Et le danger est bien réel quand on connait leur détestation viscérale des enfants et que l’on assiste, impuissant, au colloque qui fomente le plus ambitieux des complots contre l’humanité, à savoir, anéantir tous les enfants de Londres, puis de la planète.

Les adultes ont tort de raconter des bobards aux enfants…

Cette mission de la plus haute importance ne se fera pas sans une troupe de sorcières criminelles particulièrement motivées et enthousiastes à l’idée de mener à bien ce projet. La plus cruelle d’entre elles, la Grandissime Sorcière a conçu pour cela une potion radicale pour faire de ces vermines de minuscules rats ou souris. La population en panique fera le sale boulot et se chargera de les exterminer. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, voilà que notre héros curieux se voit être une des premières victimes de cette magie noire… Difficile de sauver le monde quand on se retrouve dans la peau d’un rat… Ceci dit, avec une grand-mère comme celle du protagoniste, une lueur d’espoir semble envisageable… Reste à saisir le moment opportun pour œuvrer comme il se doit… Sacrées sorcières, méfiance, les enfants-souris – bien entourés – ont plus d’un tour dans leur sac…

Quelques heures à peine après ma lecture du grand classique de Roald Dahl, j’ai pu prolonger le plaisir de cette parenthèse au goût d’enfance en tournant les pages de l’adaptation de Pénélope Bagieu, qui connaît déjà un certain succès. Proposer autre chose que les célèbres illustrations de Quentin Blake n’est pas chose aisée. Si j’admets aimer profondément le trait plus sombre et rugueux du dessinateur anglais, parfait pour distiller la peur, j’avoue avoir apprécié ce charmant souffle de modernité apporté par Pénélope Bagieu.

Les enfants sont répugnants ! Répugnants ! Ils puent ! Oh oui, ils puent !

Si l’on sent bien chez elle l’importance d’être proche de la trame narrative de l’œuvre originelle, elle ne cède pas à la tentation de l’adaptation servile en offrant aux lecteurs des planches trop scolaires et absolument calquées sur le roman. L’on appréciera de retrouver, par petites touches subtiles et bien senties dans sa manière de revisiter les cases, les combats et engagements de l’autrice… Une femme de ménage remplacée par un homme de chambre, un héros métisse et son allié devenu alliée, une grand-mère ingénieuse qui troque ses pelotes de laine ronronnantes pour des bas de contention salvateurs de super héroïne… Autant de détails – loin d’être anodins ou anecdotiques – quand on cherche à casser les clichés et quand on défend la diversité et l’égalité des représentations avec ferveur. Une belle manière de s’emparer de ce classique de la littérature enfantine.

Moi aussi maintenant, ma famille, c’est toi.

Enfin, si cela transparaît déjà dans l’œuvre de Road Dahl, force est de constater que l’album de Pénélope Bagieu est aussi une véritable déclaration d’amour aux grands-mères et à ce lien si particulier qui unit ici deux générations, complices et passionnées, toutes deux attachées au pouvoir des fables qui entretient le goût de l’humour et de l’aventure. Leur alliance contre des forces maléfiques se révèle bien plus profonde qu’il n’y paraît. Ensemble, chacun apprend à affronter ses peurs, à accepter ce que l’on est ou ce que l’on devient.  Tolérance, vaillance et audace, une sacrée trinité portée par les crayons facétieux de Pénélope Bagieu.

Chez Stephie
Sacrées Sorcières de Pénélope Bagieu
D’après le roman de Roald Dahl
Éditions Gallimard
dans la collection Bande dessinée
ISBN
: 9782075126939
24,90€ /  pages / Janvier 2020
9e Art – BD de la semaine.

36 réflexions au sujet de « Sacrées Sorcières – Roald Dahl & Pénélope Bagieu »

    1. Je pense (mais la mémoire me fait peut-être défaut) ne l’avoir jamais lu. J’ai d’autres titres comme Les deux Gredins ou La potion magique de George Bouillon que je suis sûre d’avoir lus en revanche et dans lesquels je me replongerais volontiers.

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