C’est une histoire de fous. C’est la nôtre maintenant.
Elle s’appelle Addidas et il ne faudra pas attendre très longtemps pour être saisi par son impertinent sens de la répartie et sa grande force de caractère. Elle vit avec son père, ramoneur au noir dans une ville où il faut savoir se cacher et prendre la poudre d’escampette quand le danger se fait sentir. Assez fine et agile pour se glisser dans les conduits trop étroits, elle l’assiste entre deux parties de mots-croisés. L’autre facette moins réjouissante et non négligeable pour affiner le portrait de cette demoiselle est sa tendance à sombrer dans un coma éphémère, durant lequel certaines visions étranges s’emparent de son esprit en veille.
Y a-t-il un moyen pour que les hommes cessent de faire du mal, même par inadvertance?
Un matin où son père – encore trop ivre de sa soirée passée accoudé sur le zinc – peine à se mettre au travail, l’intrépide Addidas le remplace pour lui éviter de sérieuses déconvenues. Un mot de trop, une altercation malheureuse avec un autre duo de ramoneurs et la voilà qui se perd dans les méandres des boyaux de briques qui semblent interminables à échelle d’enfant. Durant ses errances souterraines, elle découvrira un monde de machines et de créatures s’activant dans le bruit et la fumée. Témoin involontaire d’une scène d’exclusion de l’une d’entre elles, elle se retrouve nez-à-nez avec un incroyable personnage aux allures de Golem charbonneux qui lui ouvre les yeux sur ce monde à l’abri du regard des hommes. Commence alors une folle aventure faite de fuites et de recherches, de courses-poursuites, de rencontres aussi saugrenues qu’inattendues qui emportent le lecteur de manière immédiate. Mais cette échappée souterraine n’est pas sans risque. Ses faiblesses la fragilisent et une force supérieure menace de lui faire courir le plus grand des dangers.
Cet endroit, c’est ici. Ce n’est pas la ville et pas la campagne. Ce n’est pas faux et pas vrai. C’est du temps qui passe. C’est un refuge. On est invisible. Même à nous-mêmes. Vous verrez, vous vous y ferez très vite.
Dans un décor industrialisé fait de briques et de cheminées surgit cette gamine dont nous percevons rapidement la singularité. Addidas est une héroïne comme on aimerait en croiser plus souvent et j’ai adoré croiser sa route au milieu des cases et des bulles. Alternant des séquences glaçantes et des instants plus doux et légers, il ne faudra toutefois pas se méprendre, ce conte urbain n’est pas destiné aux plus jeunes…
C’est une chose de raconter une histoire, c’en est une autre de savoir l’écouter.
Un album dont la grande force repose sur son rythme cadencé et ses personnages – principaux comme secondaires – sacrément bien croqués sous les crayons de Peeters dont j’aime définitivement le trait pêchu. (Je l’ai en ce qui me concerne lu dans la version couleur d’Albertine Ralenti mais l’intégrale en noir et blanc me fait de l’œil…) Leur équipe soudée et les duos qu’ils forment sont redoutablement efficaces et leurs aventures – soutenues qui plus est par la grande qualité des dialogues – ont de quoi tenir vivement en haleine.
Vous l’aurez compris, Koma se dévore et offre un très joli moment de lecture loin d’être aussi léger qu’il n’y paraît. Plus on tourne les pages, plus l’on se frotte à un récit profondément métaphysique qui rappelle également les contes philosophiques voltairiens. L’entrée dans ce monde parallèle nous fait voir d’un autre œil cette ville sombre et menaçante et le lecteur se laissera prendre au jeu du glissement fantastico-onirique qui survient au fil des aventures des protagonistes. C’est peut-être sur ce point, que le bémol surgit dans une lecture qui m’a néanmoins enchantée pour les deux tiers de l’album. La dernière partie divisera assurément les lecteurs qui seront fascinés par la tournure poétique et délirante que prendra le destin d’Addidas, d’autres resteront peut-être plus sceptiques et perdus face à l’issue du récit. (J’avoue faire encore office de funambule face à ce choix)…
À découvrir absolument !
Peeters au milieu des livres: L’odeur des garçons affamés.
La chronique de Jérôme et celle de Mo.
Koma – Pierre Wazem et Frederik Peeters
Couleurs: Albertine Ralenti
280 pages / 29.95€ / Mai 2017
ISBN: 9782731667523
Éditions Les Humanoïdes associés
Stephie & Gaëtan Nath Bouma Natiora
Mylène Blandine Lili Caro Soukee
De prime abord, je n’y serais pas allée, la couverture ne m’attire pas. Mais pourquoi pas? Et ton interrogation quant à la fin a de quoi intriguer
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J’ai arrêté de m’arrêter aux couvertures. Même si j’aime acheter les jolis livres qui me tentent par leur couv’ bien faites. Disons que j’essaie d’aller plus loin que ce premier contact qui provoque des décisions parfois très arbitraires.
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Elle a tout pour me plaire !
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Tu as lu l’intégrale?
C’est une pure découverte pour moi (mais où étais-je quand cette bd est sortie?)
Je préfère aussi la version en noir et blanc.
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J’ai lu la version couleur qui ne m’a pas déplu mais j’avoue que l’intégrale en noir et blanc me tente beaucoup.
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Tu me tentes bien dis donc, même si c’est barré, même si c’est sombre, même si c’est dans un décor industriel…
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Je ne te cache pas que ça ne me tente pas du tout. Et ton bémol est rédhibitoire pour moi.
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Je comprends. Il aurait pu l’être aussi pour moi si j’avais lu cette chronique.
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je trouve le dessin comme le scénario très intrigant. merci pour la découverte.
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Je t’en prie. Cet univers m’a vraiment beaucoup plu.
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Je ne sais pas trop, pas très emballée de mon côté…
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Tu as l’embarras du choix dans les suggestions de ce mercredi.
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Une série que j’ai vu passer de nombreuses fois à la bib, mais dont les couvertures ne m’attiraient pas plus que ça… J’y jetterai un oeil plus attentif !
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Oui, essaie. Cela vaut le coup de s’y pencher.
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Je n’ai pas trouvé le lien chez Stephie…
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Comme Blandine, je n’y serais pas allée spontanément mais ton billet m’intrigue.
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Il faut savoir se laisser tenter malgré les réticences premières…
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La couverture ne m’attire pas, mais ton billet me fait douter…
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À emprunter dans ce cas, cela limite la prise de risque.
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C’est sombre mais j’aime bien les deux auteurs, je la note 🙂
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Je ne connaissais que Peeters…
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Encore un incontournable et une intégrale qui m’attend sur mes étagères, chouette !!
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Hey hey ! Alors bonne lecture ma Nouk !
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Pas sûr d’aimer les illustrations, mais tu es si enthousiaste. A essayer
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Moi j’aime de plus en plus le trait de Peeters.
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Je pense que c’est la curiosité qui l’emportera, j’essaierai sans doute !
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Je te souhaite de rencontrer Addidas!
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au départ je n’étais pas tentée par la couv’ mais avec ce que tu dis du contenu… à voir !!
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Franchement, l’héroïne vaut le détour !
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Je l’ai lue il y a quelques années. J’avais adoré ! Ça me donne envie de la redécouvrir en noir et blanc…
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Je comprends. Elle a un charme certain aussi de cette manière.
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