Et mon coeur fait boum·L'Art du Roman·Que jeunesse se fasse...

Filles de la Walïlü- Cécile Roumiguière

Est-ce que le malheur est pire s’il n’est pas annoncé?

La presque île de Iurföll a quoi attiser les curiosités. Sur cette terre, les femmes ont appris à vivre en l’absence des hommes. Alors qu’ils partent en mer pour des semaines ou des mois, elles ont fait le choix de ne pas être que des êtres rongées par l’attente et le désarroi. Sur cette île, elles siègent au conseil des femmes, prennent les décisions qui régissent la vie de leur ville et transmettent à leur progéniture le goût de la liberté et de l’indépendance. Comme le dit si joliment Barbara, elles ne sont pas de celles qui meurent de chagrin et n’ont pas la vertu des femmes de marin. Si les hommes s’en vont, elles demeurent libres de vivre épanouies sans entrave sociale ou morale.

J’ai appris. Un jour, j’ai décidé de ne plus subir, de ne plus me perdre, j’avais besoin de solitude pour me retrouver mais personne ne m’a avais montré comment vivre seule dans la forêt.

Albaan et Lilijann vivent ainsi dans ce monde qui semble hors du temps, dans cette société au carrefour des traditions et d’une modernité des plus contemporaines. Elle grandissent à mesure que l’on tourne les pages de ce roman et apprennent à trouver leur place au sein de cette communauté qui laisse une si belle place à leur individualité. Mais si ce monde a quelque chose de très avant-gardiste, il n’en demeure pas moins qu’il porte en lui ses fragilités et ses inquiétudes face aux croyances qui sèment le doute et le trouble dans les esprits les plus vulnérables. Hélas, les légendes séculaires ont pour elles la force des années nourries par la crainte. Et que dire du poids des secrets qui prennent racine comme de mauvaises herbes qu’on ne remarque pas immédiatement et qui prolifèrent comme du chiendent?

Le silence, parfois, on peut en mourir. Ça j’en suis sûr. Le silence, ça me connaît.

Le roman de Cécile Roumiguière est un passeport pour un monde qui, s’il ressemble parfois au nôtre, surprend par sa grande singularité. Elle signe ici une histoire qui ne donne pas cette impression de déjà lu dans le paysage littéraire actuel. J’aime infiniment sa plume, et depuis longtemps. Dépaysante, fine et délicate, engagée, gage d’une ouverture d’esprit qu’il est si nécessaire d’offrir aujourd’hui aux lecteurs. Les filles de la Walïlü est un roman au goût de sel, aux odeurs de feuillages. Un roman aux personnages d’une beauté écorchée qui vient du Nord ou de l’Est. Un roman dans lequel les femmes sont de celles qui assument leurs choix de vie sans se soucier des bruits qui courent et des langues qui médisent. Un roman ou les sorcières ne sont pas toujours celles qui l’on croit. Un roman qui apprend à cueillir le bonheur au cœur même des peurs qu’on dompte ou apprivoise. C’est assurément beau, absolument intelligent et délicieusement passionnant.

Il n’y a ni comptable, ni dieu, ni diable, pour orchestrer les destins.

BO des pages tournées: Sweet Blossom – Émilie Simon

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Cécile Roumiguière au milieu des livres: Le fil de soie  /  Parole de papillon   /  Sur un toit, un chat  /  Mon chagrin éléphant.

Filles de la Walïlü– Cécile Roumiguière

Illustration de couverture : Joanna Concejo

École des Loisirs

Collection Médium

Février 2020

ISBN:9782211305297

268 pages / 15,50€

27 réflexions au sujet de « Filles de la Walïlü- Cécile Roumiguière »

  1. Je le veux ! Il me le faut ! Tu m’agaces à parler des livres comme ça… heureusement que j’habite en pleine campagne et pas à côté d’une libraire. Ah ? j’ai internet à la maison et je peux acheter quand même… Non ! ce n’est pas raisonnable. 😉

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    1. Quand j’ai lu la 4e de couverture et que j’ai su que Cécile était à l’origine de cette belle histoire, j’ai eu la même réaction ! Besoin de la lire et de l’avoir très vite. Ce roman m’a accompagnée durant toutes mes pauses thé/trains lors de mon séjour angoumoisin et je l’ai dévoré. Pour le reste, je te laisse opter pour la raison, la patience ou le caprice de lectrice…. Bises !

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