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Billy Symphony – David Périmony

Il sommeille dans l’ombre d’une vitrine sous les yeux des passants. À peu de chose près, personne ne le remarquerait. Et un jour, c’est le regard de Billy qu’il vient arracher à ses rêveries de promeneur solitaire. Dès lors, il devient son obsession et le jeune garçon aux poches trop vides se démènera avec ferveur pour s’offrir l’instrument de musique tant convoité. Les marais tortueux deviennent les témoins – malgré eux – d’une mélodie bancale que l’on préfèrerait n’avoir jamais à entendre. N’est pas musicien qui veut, et autant dire que Billy n’est pas un saxophoniste hors pair.

Mais par le même hasard que celui qui a fait se poser les yeux de Billy dans la vitrine, les lois de la gravité provoquent une autre rencontre impromptue. Une chute bienheureuse et quelques éclats de coquille plus tard, un petit oiseau trouve refuge dans l’instrument qui peine à trouver le bon ton et la note juste. Comme par magie, l’hôte musical passe de l’intrus à plume à l’allié idéal. Fort de cette amitié naissante, Billy se sent prêt à conquérir le monde et à enrober de notes et de mélodies le public ébahi par ses prouesses de mélomane. Mais là où d’autres saisissent toute la beauté des croches et des doubles croches, certains voient se multiplier les dollars sur la portée du succès. Et le petit Billy, grisé par l’enthousiasme, n’a pas nécessairement les bonnes armes pour se méfier des pactes faustiens qu’on signe trop vite avec de diaboliques moustaches cupides.

La belle audace que de proposer à ses lecteurs une symphonie silencieuse. Voilà un premier album pour David Périmony qui fait son entrée en solo dans l’univers de la BD jeunesse. Quelle plus belle scène pour lui que celle des éditions de la Gouttière qui ont vu naître Nora de Léa Mazé ou L’Émouvantail de Renaud Dillies? Un album qui réveillera en nous l’enfant amateur – et nostalgique – de cartoons tout en nous livrant les clés de ce que l’enfance perd en grandissant: l’illusion des amitiés éternelles, l’espoir des retrouvailles qu’on aimerait voir renaître des départs déchirants.

Avec ce titre, le lecteur assiste à l’heureuse naissance d’un héros et d’un auteur. Le premier voit le jour sous la lueur des projecteurs dans une palette de couleurs délicieusement harmonieuses, le second prend son envol sans bulles en signant un récit d’une redoutable efficacité narrative. Mais si les mots sont absents, ils existent dans ce que dégage le trait vif et alerte, ô combien expressif de David Périmony, ils se devinent dans les trognes arrondies facétieuses à souhait, dans le faciès clownesque de certains personnages, dans leur gestuelle de pantins délestés de leurs entraves. Et si l’on tend l’oreille, la musique, à son tour, se fait langage comme un joli pied de nez à ceux qui ne voient pas plus loin que le silence des cases muettes…

(Bon voyage Billy, au-delà des marais de Cappy et des méandres des hortillons. Quelque chose me dit que de très jolies choses – hautement méritées – t’attendent.)

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Billy Symphony de David Périmony
Éditions de la Gouttière
16€ / 104 pages / 2020
9e Art / BD jeunesse (muette) / Que jeunesse se fasse
Noukette

44 réflexions au sujet de « Billy Symphony – David Périmony »

      1. Disons qu’il y a aussi pas mal d’appréhension sur la réception de l’objet finalisé… Mais je n’avais pas de doute sur le fait que ma rencontre avec Billy serait belle.

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