Et mon coeur fait boum·L'Art du Roman

Call me by your name – André Aciman

J’éprouvais le bonheur incertain de ceux qui sont trop superstitieux pour prétendre qu’ils peuvent obtenir tout ce dont ils ont jamais rêvé, et sont bien trop reconnaissants pour ignorer que ce qu’ils possèdent pourrait aisément leur être pris.

Oliver vient des États-Unis et c’est en Italie qu’il passera l’été pour mener à bien les corrections de son manuscrit. Elio a dix-sept ans et voit comme chaque année arriver un nouvel étudiant hébergé par ses parents dans cette villa familiale propice à l’oisiveté érudite et aux heures studieuses. Sept années les séparent. Mais l’été et leur peau s’en moquent allégrement.

Peut-être étions-nous des amis d’abord et des amants ensuite. Mais peut-être est-ce là ce que sont tous les amants.

C’est de l’indifférence d’abord – ou du moins cela est perçu ainsi.  Puis une complicité inédite s’installe, à force de regards furtifs et de gestes fugaces. Ainsi passent les premières semaines, témoin du rapprochement lancinant, de l’obsession de l’autre qui n’attend rien d’autre que d’être assouvie. Chaque jour grappille son centimètre d’éloignement, chaque sortie réduit les distances, chaque instant favorise la proximité jusqu’à en faire oublier que l’été finira bien par leur échapper.

J’admirais tant les gens qui parlaient de leurs vices comme si c’étaient des parents éloignés qu’ils avaient appris à supporter parce qu’ils ne pouvaient les renier complètement.

Dans ce roman raconté par Elio s’écrivent la fougue fulgurante d’une rencontre et tous les questionnements que l’arrivée d’Oliver fait naître en lui. Chaque émotion traverse ainsi le lecteur qui confond sa sensibilité avec celle du jeune garçon. Et bon sang que cette histoire dévaste… André Aciman signe ici une histoire d’amour grisante et viscérale… C’est un roman des corps qui se cherchent, se caressent, s’explorent. Un roman capable de dire avec une sensualité sans pareille tous les bouleversements du sentiment amoureux. Celui qui vous saisit au cœur de la moiteur estivale, vous habite bien au-delà d’une saison vécue comme la plus inoubliable de votre vie, vous colle à la peau pour ne jamais plus vous quitter.

À cent ans, vous apprenez sûrement à surmonter la perte et le chagrin – ou vous tourmentent-ils jusqu’à la fin ? À cent ans, les frères et sœurs oublient, les fils oublient, les êtres chers oublient de se souvenir…

Pour vos oreilles: Nous restions là – Pierre Lapointe.

Si ce n’est plus tard, quand ?

Call me by your name André Aciman
Traduit par Jean-Pierre Aoustin
Roman paru aux Éditions Grasset.
Éditions Le Livre de poche pour la présente édition.
319 pages / 7,90€ /
2018

 

 

21 réflexions au sujet de « Call me by your name – André Aciman »

  1. Je suis resté de marbre autant à la lecture du livre (dont j’avais trouvé le style pompeusement désuet) et au visionnage du film. Des deux, le seul passage qui m’ai touché et que je retiens : le dialogue final du père et du fils.

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