Elle ressemble à un personnage de roman. Elle ne se rend pas compte que c’est douloureux pour les autres qui l’entourent. Elle est vivante.
Si l’on ouvre ce roman, c’est pour s’entendre raconter Sarah. La passion, la claque, le cataclysme. Le chaos qui entre dans votre vie par hasard en bousculant un peu vite vos petites habitudes et qui en sort sans discrétion, avec perte et fracas, vous laissant friable et inconsolable.
Il y a des magnolias en fleurs dans les squares parisiens, et j’ai dans l’idée que ça écorche le cœur de ceux qui les remarquent.
Alors évidemment, lire ce roman, c’est effleurer Sarah du bout des doigts, c’est caresser sa peau en tournant les pages, c’est entrer dans une sphère intime que la littérature livre avec une certaine pudeur ou un érotisme délicat. Lire ces pages, c’est aussi céder à la tentation de la colère et de l’agacement. Parce que Sarah est une tornade d’émotions et de contradictions et qu’il est parfois difficile de comprendre comment tenir face à une telle révolution dans le coeur et les tripes.
Elle ne m’aime plus. Elle ne veut plus m’aimer. Elle ne veut plus des petits matins où la radio qui hurle vient séparer nos corps stupéfaits de s’aimer autant. Elle ne veut plus des rires dans le téléphone, de la jubilation d’assortir si bien nos mots, nos drôleries, de nous accorder si parfaitement que la vie sonne juste tout le temps.
J’ai souvent lu de ce premier roman qu’il diviserait ses lecteurs, qu’on l’aimerait ou le détesterait. J’avoue jouer les funambules avec ce titre et rester sur un entre deux qui m’empêche de pencher d’un côté ou de l’autre… Pas aussi novateur que cela en matière d’écriture – comme on tend pourtant à le souligner dans de nombreuses chroniques – je ne peux néanmoins pas nier ce redoutable talent pour dire l’amour dans un tourbillon d’émotions vertigineuses. Et si cet amour-là remue les entrailles de la narratrice, cela n’est pas parvenu avec la même force jusqu’à moi.
Elle sort de ma vie comme elle y est entrée, pleine d’allant. Victorieuse.
La prose épouse ainsi le souffle dans toute sa fougue et sa diversité. Celui de l’étreinte: haletant, celui de la panique: saccadé, tranchant, celui de la fuite: épuisant, celui de la passion: fulgurant, celui de l’adieu: déchirant. La plume anaphorique sert les névroses et les obsessions, joue avec les redondances, et couche sur le papier une histoire incandescente et destructrice. Mais rien d’autre ne compte en dehors de raconter Sarah.
Mais étonnamment, ce que j’ai préféré dans ce récit, c’est aussi et surtout que ça raconte celle qui aime Sarah. Sa douleur, ses enthousiasmes des premières fois, ses trop-pleins, ses grands vides face à cette femme qui vient bouleverser sa vie. Derrière le portrait de Sarah, elle se raconte, sous l’emprise de cette sensibilité explosive qui souligne toute sa finesse et sa fragilité.
Un livre qui place deux femmes face à un même miroir qui réfléchit à contretemps leurs excès, accentue leurs failles et ravive les cicatrices impossibles à dissimuler.
Quelle douceur c’était de savoir qu’elle existe; d’en avoir la preuve. Je ne pense plus qu’à ça. Aux traces, aux preuves, au corps. Aux corps encore. Mais surtout, surtout au tangible. A ce que l’on peut toucher tant qu’on le peut encore.
Ça raconte Sarah – Pauline Delabroy Allard
15 € / 192 pages
6 septembre 2018
ISBN: 9782707344755
Mon intérêt pour ce livre commence à s’essouffler à force de le voir partout mais il reste quand même dans ma tête… Je l’emprunterai sûrement à la bibliothèque.
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Je l’ai acheté le jour de sa sortie et j’ai enfin pris le temps de le lire ce week-end. Avec la rentrée j’ai eu un peu de mal à jongler entre les cours et les chroniques. (Je pense que l’emprunter peut suffire. )
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Je continue de le trouver novateur dans cette alchimie parfaite entre la passion et la langue. Pour un premier roman je trouve qu’il bouscule quand même sacrément les codes… Je ne sais pas ce qu’il m’en restera dans quelques mois mais j’en suis ressortie épuisée tant je l’ai trouvé vertigineux !
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Effleurer Sarah du bout des doigts, voilà qui me semble intéressant 🙂
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Je vais je pense le lire, merci pour ton avis 🙂
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j’ai très envie de découvrir ce roman après avoir entendu parler l’auteur dans une émission de radio…
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Il ne me tente pas du tout celui-là ; ceci dit, il y en a suffisamment d’autres qui me tentent, je ne suis pas en manque d’idées 😉
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Je pense aussi l’emprunter en bibliothèque.
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Lu presque d’une traite en un week end. C’est dûr par moments mais je dois avouer si bien (d)écrit mais si je n’ai jamais vécu une telle aventure – ça m’a laissé une grosse trace .
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Une seconde partie qui restera une énigme.
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Elle contraste clairement avec la première mais n’est pas pour autant si énigmatique.
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Comme Aifelle ! je ne suis guère tentée finalement et malgré le très bon avis de Noukette.
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Tu y viendras peut-être plus tard qui sait…
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J’ai suivie Pauline pendant de nombreuses années sur son blog et ses mots m’ont toujours enivrée! Un bonheur de la retrouver au format roman. Malgré tout la seconde partie m’a nettement moins enthousiasmée que la première…
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Aveu honteux du soir: je ne connais pas son blog. Elle l’alimente encore?
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etlecoeurquibat.com mais depuis qu’elle est publiée elle a quasi tout enlevé
Et elle ne l’alimentait de toute façon plus depuis plusieurs années…
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malgré ton bémol, je reste vraiment curieuse de le découvrir
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Oh mais je te le souhaite !
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Je le lirai peut-être d’ici quelques temps… Noukette m’avait donné bien envie, même si tu es moins enthousiaste, j’y jetterai au moins un oeil !
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Il me tentait mais ce que j’en lis sur les blogs m’a un peu fait déchanter.
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A vrai dire, j’ai lu tout et son contraire sur ce roman…
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mouais, je ne sais plus trop… je ne sais surtout plus où donner de la tête sous ma pile de livres à lire!
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Comme je te comprends !
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Un tourbillon, une tornade oui c’est exactement ça… Le rythme saccadé m’a conquise, de même que ce tourbillon de mots et de sentiments contradictoires, amour et haine, désir et fureur de vivre en même temps que fureur de mourir
(pour en savoir plus sur mon avis 😉 : https://pamolico.wordpress.com/2018/10/23/la-grace-ca-raconte-sarah-pauline-delabroy-allard/)
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Je n’arrive pas à me décider à le lire … et ta description du « funambule » me fait passer mon chemin
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