BD de la semaine·Et mon coeur fait boum·Vous avez dit culture ?

Magritte: ceci n’est pas une biographie. Thomas Campi & Vincent Zabus

Midi. Dans 24h, je serai un homme nouveau.

Tempête sous un chapeau ou l’explosion onirique et culturelle. Il suffira d’un petit geste anodin de Charles Singulier pour que sa vie prenne un chemin inattendu. Une fois le chapeau melon déniché dans un vide-grenier déposé sur son crâne, impossible de le retirer. Une première étrange manifestation qui n’est que la première d’une longue liste aussi surprenante que déstabilisante.

L’art de peindre me paraissait alors vaguement magique et le peintre doué de pouvoirs supérieurs.

Sous ce couvre-chef, le monde prend une autre forme et le regard s’amuse de ces changements incongrus. Les reflets du miroir ou des fenêtres lui tournent le dos ou le brisent en éclat, les astres flirtent avec les arbres, les objets se meuvent ou s’envolent, les tableaux parlent… Quelle mystérieuse fièvre s’est emparée de l’esprit du héros. Et quelle est cette inconnue croisée lors d’une conférence qui l’accompagne dans ses errances et ne le laisse pas indifférent? Autant de questions soulevées qui convergent toutes vers une mission à accomplir: tant qu’il portera ce chapeau, il devra percer le mystère de son ancien propriétaire qui n’est autre que l’incroyable René Magritte. Et si les voies de l’Art étaient impénétrables?

Pourquoi vouloir répondre aux questions que la peinture nous pose?

C’est écrit trop petit, je n’entends pas !

Dans ce récit où le décalage a toute sa place, où le réel se retrouve complètement chahuté, jamais Vincent Zabus ne perd son lecteur. Peu adepte des récits absurdes, j’ai suivi avec curiosité et enthousiasme ce héros ordinaire possédé par l’esprit d’un peintre à la réputation parfois sulfureuse. Bien qu’ayant des airs de biographie, cet album croise habilement et intelligemment des bribes de vie de l’artiste tout en offrant une intrigue solide à son protagoniste qui quitte son costume d’homme ordinaire le temps de quelques planches. On découvre alors un Magritte aux mille visages et aux multiples blessures, un homme à l’inspiration débordante, un touche-à-tout facétieux.

C’est une espèce d’anarchiste viscéral, de chien fou qui se plaît à jouer au dandy ironique.

Dès lors, nous voilà comme lui plongés dans un monde dans lequel s’immiscent bien des œuvres de Magritte. Thomas Campi rend ainsi compte de toute la folle diversité de l’œuvre du peintre à travers une galerie de tableaux qui s’invitent et se fondent à merveille dans le décor sans jamais céder à la surenchère et à l’excès de références, et c’est un véritable plaisir pour les yeux. Les pages se tournent comme on déambule dans un musée et l’on se laisse prendre au jeu de ce récit fantasque qui s’offre sa part d’absurdité et de symboles. L’absence d’encrage rend possible ce jeu élégant entre le réel et l’imaginaire et offre des contours plus flous qui renforcent les frontières invisibles entre chaque dessin. Et que dire des couleurs chaudes et lumineuses, particulièrement automnales, qui ne sont pas sans rappeler la palette d’un autre génie du pinceau qu’est Hopper.

Ceci n’est peut-être pas une biographie, mais c’est assurément un coup de maître.

Je vous rends au réel, mais vous ne sortirez pas indemne de cette histoire.

Les auteurs sur le blog –  Les Petites gens / Macaroni  / Les Ombres /

Un petit tour au Musée Magritte de Bruxelles ?

Magritte: ceci n’est pas une biographie Thomas Campi & Vincent Zabus

Éditions Le Lombard

ISBN:9782803670277

Novembre 2016

14€99 /64 pages

Sélection Art et littérature

 

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