Et mon coeur fait boum·Instants poétiques·Rentrée littéraire

Comme un lundi – Carnet de bord assis tout au bord du temps – Thomas Vinau

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Le matin est un mensonge qui dit aujourd’hui peut-être.

Comme un lundi, ou la banalité de cette petite phrase jetée aux autres dans la vie. Ces mots un peu factices qui remplissent les conversations trop vides. Sous cette couverture et ce titre, rien pourtant qui ne soit dépourvu de sens. On s’équipe du scaphandre et l’on plonge en plein cœur de la vie, là où ça palpite doux. Place aux mots, aux détails qui transforment le monde, l’amènent à être vu différemment même si ce sont les instants les plus triviaux que l’on dépeint. Dire le geste, le regard, l’objet, l’être aimé en l’enveloppant d’une poésie douce qui n’a pas à craindre qu’on l’oublie.

Vieillir, c’est savoir que ça vaut le coup d’essayer.

Dans ce recueil de prose poétique, Thomas Vinau glisse des brindilles, du végétal, la douceur de la plume ou du duvet, il enferme des odeurs , capture des voix, fige l’ocre, le terreux, l’humide. Le lecteur en tournant les pages et en les lisant – parfois à voix haute – aura l’impression de s’approprier ces petits trésors qu’on amasse enfant et que l’on enferme dans ces boites métalliques pour les laisser reposer sous terre quelques années. Lire Comme un lundi, c’est exhumer cette boite une fois adulte, et laisser en surgir une nostalgie douce, un souvenir parfois amer du temps qui ne sera plus mais qui perdure en nous. Mais c’est aussi figer le souvenir d’un présent encore tout neuf. Celui des moments passés auprès des êtres chers, de l’enfant qui sommeil dans un calme gorgé de sérénité.

Nous – Dire la glace sur ta joue. Nos discussions et nos partages. Mes colères ridicules. Nos petits riens. Nos pieds sales. Tes danses sauvages. Dire le vent dans les arbres. Et les jets d’eau. Et les moineaux qui s’y baignent. Et la lumière sur les pierres de la terrasse. Dire les jouets qui ruminent à l’ombre. […] Dire les araignées. Les plantes grasses qui tombent. Nos orteils dans les mauvaises herbes. La piqûre de moustique qui trône entre tes seins. Puisque Avoir c’est Perdre et que le temps est un menteur, je note les éclats de rire, les tomates-cerises, les gouttes de sueur. Nous n’avons pas peur de la peur. Nous bricolons à petits pas. Nous sommes fourmis dans le broyeur et peu importe où va l’égout. Sur notre bouchon de fortune, nous savons ce que veut dire nous.  Nous plaignons ceux qui ne savent pas.

Lire un recueil de Thomas Vinau, c’est avoir envie de détacher délicatement les pages pour les glisser dans une enveloppe vers des destinations précieusement choisies ou pour les encadrer et les donner à voir à qui passera près d’elles. J’aime définitivement ce que cet écrivain offre à la poésie moderne. Au diable l’hermétisme qui éloigne et effraie les plus réticents du genre. Thomas Vinau vous fait entrer en poésie, imperceptiblement, avec une simplicité étonnante et grisante. Il vous laisse, sous les mots délicats et derrière la langue des poètes, cette sensation d’avoir lu un peu de vous en nous parlant un peu de lui.

La vie avance à une vitesse totalement effrayante. Il faut la regarder passer là-haut. Voir sa silhouette qui nous sème, à tire -d’aile. On lui laisse prendre un peu d’avance. On fait confiance. On la boit à la bouteille sans s’essuyer le coin des lèvres. On fait des ronds dans l’eau du ciel. On fait avec le sans.

Thomas Vinau au milieu des livres: Bleu de travail / Ici, ça va.

Les chroniques de Leil et Sabine.

Comme un lundi – Thomas Vinau

15€ – 128 pages

ISBN: 9782357071339

Éditions La Fosse aux ours

23 août 2018

Rentrée littéraire août et septembre 2018

25 réflexions au sujet de « Comme un lundi – Carnet de bord assis tout au bord du temps – Thomas Vinau »

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