BD de la semaine·Neuvième art

Le Vendangeur de Paname – Frédéric Bagères & David François

Monsieur euh… L’Écluse?

– T’es une Bleusaille toi…

– Inspecteur Pierre Caillaux, fils de Joseph Caillaux !

– Je vois… Une Bleusaille avec de l’oseille. Assieds-toi La Bloseille.

Pistonné pour son entrée dans la police, Pierre Caillaux n’est pas attendu avec impatience au 36 Quai des Orfèvres. Son arrivée est perçue comme le fruit d’un honteux passe-droit et son baptême du feu aura des relents de vieux rouge. Envoyé auprès d’un collègue relégué au sous-sol de la fameuse institution, il devra apprendre le métier auprès de L’Écluse, expert en spiritueux et grand maître es vinasse. Leur premier face à face pique comme un mauvais pinard mais a le mérite de donner le ton: sans nul doute, bien des dialogues savoureux nous attendent dans l’album. Des Tontons flingueurs aux Tontons vendangeurs, il n’y a qu’un pas… Trouvant le bon rythme, adoptant le bon ton, le récit de Frédéric Bergères est une réussite narrative qui ne se prive pas de jouer avec la langue et les mots. Savoureuse et captivante, chaque page se déguste avec un plaisir certain, nous immergeant dans ce Paris où l’alcool coule comme la Seine, ce qui ne manque ni de charme ni de panache. Derrière ce duo comique (in)efficace, tout est fait pour donner au lecteur l’envie de s’inviter dans la danse et de mener l’enquête à leur côté un verre de pif à la main. In vino veritas

Si lui, il a un grain, eh bien vous êtes tous sous la ligne de flottaison parce qu’il vous fait passer pour des calfats merdeux, et moi avec. Cinq meurtres en sept mois !!!

Pour donner corps à ce scénario rocambolesque aux dialogues de caractère, le trait de David François vient s’inviter dans les cases. Derrière cette gouaille qui dépote naissent de sacrées gueules: visages longilignes, bonhommie rondouillarde, rousseurs sensuelles et moustaches broussailleuses. Après une enquête au cœur du Familistère de Guise (De Briques et de sang) et un diptyque sombre autour du mystérieux Un Homme de joie errant dans les rues new-yorkaises, le voilà qui nous trimbale dans les quartiers parisiens loin d’être toujours recommandables. Catin égorgées, flicaille malmenée, messages codés à la Duchamp: complets beiges et chapeaux melons s’agitent et s’affolent pour tenter par tous les moyens de résoudre une enquête qui s’embourbe et n’aboutit pas malgré tous les moyens mis en œuvre pour démasquer le coupable. Comment ne pas se laisser entraîner dans cette course folle, porté par ce trait qui sait avoir la vivacité d’un coup de griffe et qui peut parfois délaisser les lignes droites pour des courbes et des flous vaporeux. Grisant… (et très harmonieusement enveloppé d’une palette de couleur travaillée à quatre mains avec le barbu-chevelu-chiconné-à-bretelles, David Périmony.)

Deux victimes de plus et toujours pas le tirant d’une piste. On est les marins du bateau lavoir de la flotte policière!

Les chroniques de mes comparses Noukette & Jérôme.

Un album à s’enfiler cul-sec !

Le Vendangeur de Paname – Frédéric Bagères & David François

Couleurs: David François & David Périmony

Une enquête de l’Écluse et la Bloseille

Éditions Delcourt

ISBN:978-2-7560-7943-1

15€ 50/ 60 pages

Janvier 2018

Chez Mo

 

37 réflexions au sujet de « Le Vendangeur de Paname – Frédéric Bagères & David François »

  1. Voilà… quand j’ai lu le pitch la première fois, ça ne m’a pas emballé. Idem pour la couverture.
    Puis Noukette et Jérôme ont partagé leurs avis…
    … et toi…
    mince… je commence à me dire que j’ai bien envie de lire ce titre à mon tour ! 😛

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    1. Je ne lis quasiment plus les 4e de couv ou les feuillets de présentation – quelques blogs incontournables tout au plus et encore – avant de me lancer. Avec David François, je ne me pose même pas la question. Je file et je sais que ça marchera.
      Je te souhaite vraiment de la découvrir (et suis ravie de te lire ici à nouveau ! 😉 )

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