BD de la semaine·Et mon coeur fait boum·Neuvième art

L’Homme en pièces – Marion Fayolle.

L’Homme en pièces. C’est celui qui fait de vous une femme en pièces. C’est celle qui vous brise en mille éclats. C’est celui qui vous déstabilise, vous égratigne,  vous malmène. C’est celle qui vous arrache le cœur en vous persuadant qu’il ne servira plus après lui en vous laissant en tête à tête avec votre tristesse. Mais quand vous vous y attendez le moins, l’Homme en pièces n’est plus qu’un léger nuage de bulles faites de bons et de mauvais souvenirs. Un nuage qui n’attend plus qu’un souffle nouveau pour faire voleter les derniers morceaux, pour alléger et libérer les esprits et les cœurs lourds en leur offrant l’occasion de palpiter à nouveau. L’Homme en pièces raconte aussi ces êtres qui ont tenté d’apprivoiser la solitude, qui ont sali leurs mains sur d’autres bouches, qui ont semé une graine sans espoir pour laisser pousser l’arbre qui saisit les gorges des désespérés. L’Homme en pièces n’a pas de sexe: il est elle, il est celui. Tout puissant un jour, infiniment fragile le lendemain, définitivement perplexe, parfois hagard, assurément épars. Son corps est voué à l’éclatement, à la déconstruction, à la reconstitution, quelle que soit la forme qu’il trouvera dans sa folle métamorphose

Nul besoin de mots quand le travail du mouvement et du geste suffit à prendre le lecteur par le bout du crayon pour raconter l’histoire si complexe des liens qui unissent et désunissent les êtres. BD muette, L’Homme en pièces n’en est pas pour autant dépourvue d’une grande puissance suggestive et narrative. A chaque planche, Marion Fayolle s’approprie avec sa singularité et son ingéniosité ces temps forts des vies qui se partagent, se croisent, s’évitent. Travaillant chaque séquence comme un pas à pas qui se gorge de symboles et de métaphores, l’histoire racontée en silence se fait délicieuse, facétieuse, le trait, les courbes se font langage. Et de temps en temps, s’évapore le goût de jeu et de la légèreté pour céder la place à une chute grinçante et glaçante. Parce que les relations humaines sont aussi faites de ces deux facettes-là…

Comme à chaque lecture d’un album de Marion Fayolle, je suis conquise, happée par ce talent si percutant et saisissant de ses mises en situation. C’est un premier album qui portait assurément déjà en lui toutes les promesses de réussite qu’on lui connaît – et lui souhaite encore. J’aime indéniablement ces corps qui semblent si figés pour celui qui ne s’attardera pas sur sa lecture et passera à côté du mouvement libérateur qui s’invite dans les pages. J’aime cette concision qui n’a pas besoin de bulles, qui ne s’impose aucune case, qui n’impose aucune phrase. J’aime aussi ce qui m’échappe dans ces petites planches de vie, ce que j’y vois, ce que je ne saisis pas toujours, ce qu’elles me rappellent. J’aime m’y retrouver comme l’on s’observerait dans un miroir qui modifierait quelque peu la réalité pour donner à nos portraits reflétés une dimension plus symbolique et universelle. J’aime absolument tout ce que fait Marion Fayolle, mais cela ne vous aura pas échappé je crois…

Les mains sales – Marion Fayolle

Une BD – offerte par Ma Petite – à lire silencieusement…

Marion Fayolle sur le blog:

La Tendresse des pierres / Les Coquins / Les Amours suspendues.

Chez Stephie

L’Homme en pièces – Marion Fayolle.

1ère Édition Michel Lagarde / Éditions Magnani

Février 2016

60 pages / 20€

ISBN: 979-1092058161

42 réflexions au sujet de « L’Homme en pièces – Marion Fayolle. »

    1. Je pense que le moins « conceptuel » reste l’album La Tendresse des pierres. Parfait pour un premier rendez-vous émouvant avec le travail de Marion Fayolle. Si cela te plaît, tu pourras t’aventurer vers les autres albums…

      J’aime

  1. Tu sais, j’ai La tendresse des pierres sur mes étagères et je n’ose pas encore… Je sens intimement que ça peut me bouleverser… autant que me passer au-dessus. Mais j’y viendrai, promis ❤

    J’aime

Laisser un commentaire