Je déteste les adieux qui n’en finissent pas.
Des pages blanches, l’envie qui n’est plus, une plume asséchée, un pinceau qui ne trouve plus sa voie sur le papier. Un sentiment difficile à expliquer, une source tarie qui n’alimente plus l’esprit. Des mots qui ne nourrissent même plus la parole quotidienne et qui restent bloqués au creux de la gorge. Un homme qui vivote et laisse s’éteindre son couple, noyé dans ses pensées et ses silences. Voilà où en est Simon Muchat lorsque l’histoire commence.
Un jour, un salon du livre l’entraîne au Portugal et l’oisiveté s’immisce dans ce déplacement professionnel… Ce pays soudain l’appelle et cette pulsion de vie l’invite à se laisser happer par l’ambiance si singulière qui y règne… Aller déterrer ses racines, gratter la terre ocre et sèche du Portugal pour laisser jaillir les souvenirs et pour tenter de remplir ce vide qui le gagne. Un retour à la terre et aux sources qui dépasse l’idée même d’un voyage nostalgique. Entre les cases, se jouent une reconquête de soi et une nécessaire renaissance.
J’étais fasciné et heureux. Un vrai crétin.
Si je me souviens bien, j’ai eu envie de lire cette BD le jour même où j’en ai aperçu la couverture. J’ai dû, étrangement, l’aimer avant même de décider d’en lire la moindre planche. Après deux séjours portugais, relire ce roman graphique revient finalement à toujours repartir un peu. Retrouver ces rues grouillantes, ces visages flous, ces souvenirs qui ne demandent qu’à renaître, ces silhouettes au teint hâlé, ces lieux qui ne vieillissent jamais vraiment.
Pedrosa nous balade ainsi au gré de ses inspirations colorées et le sens de la nuance est de mise. Le trait se fait léger, parfois tremblotant, se moquant allégrement de la rigueur en lui préférant une certaine nonchalance charmante, proche de ces esquisses que nous aimerions tous savoir figer lors de nos voyages. Il parvient à créer une atmosphère unique qui épouse à merveille les questionnements existentiels de son héros.
Est-ce que je suis le pays où je suis né ou est-ce que je suis peu importe le pays ?
L’amour et la honte. Cela pourrait être la devise des familles de migrants.
La lecture de Portugal repose sur un voyage en deux temps: une immersion progressive dans un pays et un plongeon vertigineux dans un passé. D’une densité évidente, cet album introspectif est le résultat d’un travail minutieux. Souvent (très/trop?) bavard mais toujours subtil et juste dans le choix des silences, Pedrosa offre aussi à ses bulles l’envoûtante musique de la langue lusophone – sans traduction – transportant ainsi le lecteur dans cette patrie riche de son histoire familiale. On se laisse alors prendre au jeu des rencontres et des histoires de famille, sensible à la fragilité d’un héros qui se cherche un peu… Pedrosa conte du bout de son crayon et de ses pinceaux, avec une tendance un poil nombriliste inévitable pour un tel projet, ses racines et les gens qui y sont attachés. Puis, de manière assez fine, il dépasse enfin la sphère de l’intime et pose avec une force discrète, les jalons d’une réflexion sur ce qu’implique le fait de quitter un jour son pays et de devoir trouver sa place dans un autre.
Une belle relecture qui s’inscrit dans ma semaine consacrée à ce pays que j’aime tant.
Les chroniques d’Yvan, Mo, Jérôme, L’Ivresse et Saxaoul.
Portugal de Cyril Pedrosa
2011
ISBN: 9782800148137
35 € / 260 pages.

Une pépite cet album. Tu me donnes envie de le relire !!!
J’ai prêté mon exemplaire à une amie. Curieuse de savoir comment l’album lui a parlé. Mais je crois bien que lorsqu’elle me le rendra, il va faire un petit détour entre mes mains avant de retrouver sa place sur mes étagères 🙂
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Les relectures ont du bon ! C’est le cas avec ce titre que j’ai redécouvert quelques années après sa lecture !
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Nul doute que je finirai par la lire 😉
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I hope so !
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J’ai adoré cet albume, qui fait voyager et pose des questions essentielles.
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C’est bien résumé ! Un beau titre.
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J’adore cet album parce qu’en tant que fillle d’immigrés portugais j’ai l’impression de lire ma propre histoire, j’y retrouve beaucoup de choses qui me sont chères et font partie de moi. Je suis contente de lire que tu l’as aimé aussi et que tu aimes tant ce pays 🙂
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Je comprends donc d’autant plus qu’il trouve une résonance particulière chez toi. Quant à mon attachement au Portugal, quelque chose me dit qu’il y aura d’autres voyages. Tu vas à Lisbonne même?
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J’ai mes grands-parents maternels et mes cousins dans la proche banlieue de Lisbonne et ma grand-mère paternelle à 100 km, ça me fait voir du pays 🙂 L’an passé avec mon homme on s’est fait un week-end à Porto pour voir et j’ai adoré ! Il me reste encore un tas d’endroits à découvir bien que j’y aille depuis mon enfance, c’est tellement beau… Et on peut encore bien découvrir le pays pour pas cher alors oui, profite 🙂
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Tu me donnes envie de le relire ! Il va falloir que tu arrêtes avec le Portugal sinon je vais devoir changer mes plans pour les prochaines vacances 😉 !
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C’était aussi une relecture pour moi. Lecture restée orpheline de chronique mais c’est maintenant chose faite ! Bonne relecture !
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Jérôme et Mo’ me font la guerre parce que je n’ai toujours pas sorti cette merveille de mes étagères… Honte à moi, elle y dort quasiment depuis sa sortie…! Promis, je la lis cette année ! ❤
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Tu sais, avec ce qui prend la poussière sur mes étagères, j’ai de quoi avoir honte de certains retards de lecture ! Mais je vais guetter ton billet !
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Quelle belle chronique ! Je me suis autant laissée bercée par tes paroles que je le serai par le texte de Pedrosa quand j’y mettrai enfin le nez ! Je l’ai découvert récemment avec Trois Ombres et Equinoxes, celui-là sera le prochain 🙂
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Merci beaucoup Sita. Je n’ai pas encore Equinoxes mais Trois Ombres est sur mes étagères ! Hâte !
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Tu en parles tellement bien que ça m’a donné envie de le lire! Et la couverture est sublime!
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Merci ! Alors tu sais ce qu’il te reste à faire ! ^^
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Il m’attend celui-là! Magnifique chronique!
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Merci Karine ! J’espère que tu l’aimeras comme moi…
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je l’avais trouvé très triste…
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Certains passages le sont. Indéniablement.
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Adoré cet album, qui m’a donné envie de me rendre au Portugal, un pays que je n’ai pas encore eu la chance de visiter ! Les couleurs de Pedrosa sont magnifiques !
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Je trouve aussi. Elles reflètent parfaitement l’ambiance là-bas.
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J’ai beaucoup aimé Les équinoxes, il faudrait que je lise celle-là aussi !
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Il faudra quant à moi que je me lance avec Les Equinoxes…
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Que j’ai aimé ce livre ! Un bonheur…
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Il a provoqué l’enthousiasme de ses lecteurs !
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Oh la, comme tu me donnes envie de m’y plonger ;0) J’ai un peu honte parce qu’il traine sur mes étagères depuis mon anniversaire (pas celui de janvier de cette année, celui d’avant, oui la honte ;0) Enfin, bref, faut que je m’y mettes (et voilà un voyage que j’aimerais bien faire aussi :0) Bises
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Du nombrilisme brillant, maîtrisé et émouvant. Un album que j’ai adoré, cela va s’en dire^^
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C’est rare que ce genre de récit te captive, c’est dire s’il vaut qu’on s’y attarde. ^^
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Je l’ai chez moi… et je ne l’ai pas encore lu, moi qui aime tant Pedrosa. Sacrilège!
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