Et mon coeur fait boum·Je lis des albums·Que jeunesse se fasse...·Rentrée littéraire

Le Grand Incendie – Barroux & Gilles Baum

Là, au cœur du monde où il fait toujours chaud, où le sol a la légèreté et la finesse du sable et où le soleil réchauffe les visages, vit un Sultan qui a les livres en horreur  et qui exècre les beaux mots qu’ils renferment comme de petits coffres à trésor. Qu’à cela ne tienne, la voix des puissants est de celle qui détruit: un immense autodafé est annoncé et le nuage de fumée est tel qu’il semblerait qu’aucun livre ne survive à ce spectacle de désolation.

Loin de l’agitation de la ville, une feuille noircie s’est échappée avec le vent et s’est retrouvée entre les mains d’un jeune garçon. Poussé par la curiosité, il suit le chemin de fumée et comprend vite ce qui se joue sur la grande place. Au milieu des cendres, les histoires livrent encore, dans un dernier souffle, quelques bribes de récits appartenant désormais au passé. Dans cette ville où vient de naître un cimetière littéraire, l’enfant se fraie un passage. Observé, il ne sait pas encore que d’un geste ô combien symbolique, il va éveiller les esprits encore sous le choc du Grand Incendie. L’espoir face à la tyrannie, la culture face à l’infinie bêtise. Le combat à livrer semble rude mais n’a rien d’impossible, et c’est assurément pour cela que cet album est si beau.

Je reste là, ou pas loin, des jours durant. J’attends que le Sultan ait accompli son œuvre, que le monstre soit repu, que les flammes se taisent, que les braises refroidissent. Je regarde le dernier livre partir en fumée.

Amour des livres, j’écris ton nom. Découvrir Gilles Baum avec cet album a tout d’une belle surprise. Les mots choisis sont incroyablement justes et délicats et lorsqu’ils se savent portés par le trait de Barroux, cela donne vie à une petite pépite à lire et relire inlassablement. La brièveté du genre exige une concision impeccable et autant dire que la plume de Gilles Baum parvient avec talent à raconter les hommes à la fois dans toute leur violence absurde et dans leur sublime révolte.

Barroux, dresse en toile de fond un ailleurs chaud et hostile qui aurait pourtant tout pour être beau au cœur d’une cité faite de tours massives et imposantes. Tout en haut, un petit homme à l’esprit étriqué se cache, protégé d’immenses murs blancs devenus le bouclier de sa folie destructrice. Aux traits rectilignes s’opposent les ondulations d’un incendie terrifiant et les volutes de fumées masquent, tout en bas, la colère des grands hommes. Décidément, à chaque album signé Barroux, mon admiration pour cet illustrateur grandit tant le traitement des sujets qu’il aborde me parle et me touche considérablement…

A leur tour, ils partent en quête de perles de charbon.

Jeune lecteur, tourne donc les pages de cette fable à l’odeur de cendre. Cet album te racontera un désastre mais hurlera au-delà des flammes combien les mots sont puissants et beaux. Il te prendra par la main et te murmurera la cruauté des hommes. Laisse l’histoire faire son chemin, laisse-toi gagner par l’incompréhension, la colère. Grandis avec l’amour des livres et souviens-toi un peu de cet album-là lorsque, plus grand, tu tourneras les pages des Autodafeurs puis de Fahrenheit 451 et que l’adolescent ou l’adulte que tu deviendras verra se réveiller en lui les révoltes silencieuses de l’enfant lecteur.

La chronique de Noukette.

Le Grand Incendie Barroux & Gilles Baum

Les Éditions des éléphants

Avec le soutien d’Amnesty international

32p / 14€

ISBN: 978-2-37273-026-6

Septembre 2016

Rentrée littéraire

Rentrée littéraire 2016 3% Touche à tout 10/18
Rentrée littéraire 2016
3% Touche à tout 10/18
14e/20 Hérisson
14e/20 Hérisson

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

23 réflexions au sujet de « Le Grand Incendie – Barroux & Gilles Baum »

    1. On me pose souvent cette question. J’avoue que ça me pose toujours un problème d’y répondre tant je peine à donner un âge pour cibler les lecteurs. Le site éditeur préconise dès 6 ans.

      J’aime

  1. Un superbe album, oui. Pour répondre à une question qu’on t’a posée, je l’ai lu à mon TroGnon qui a 6 ans. Nous avons pas mal discuté ensuite de toute l’histoire … La réaction de mon fils fut « mais c’est horrible de brûler des livres ».

    Aimé par 2 personnes

Répondre à noukette Annuler la réponse.