Neuvième art

Communardes ! Les éléphants rouges W.Lupano et L.Mazel

1870. Les temps sont durs et l’enfance n’a pas la même saveur quand on se voit contrainte de vivre dans un Paris assiégé et affamé. Victorine, petite brunette au caractère bien trempé trouve comme seule échappatoire ses rendez-vous quotidiens au Jardin des plantes. Loin d’être passionnée par la botanique, elle préfère s’occuper des animaux de la ménagerie et parvient même à négocier le droit de les soigner contre quelques centimes ce qui ne fait pas le bonheur de sa mère qui a d’autres projets pour elle.

Les choses s’arrangent pour ceux qui se laissent pas faire ma fille. Retiens bien ça.

Pendant que Victorine s’affaire auprès de ses protégés, les femmes commencent à s’impatienter de la situation dans laquelle Paris sombre à petit feu. Le peuple a faim, le travail se fait rare, les hommes sont loin. Si la jeune fille a conscience de cette révolte qui gronde, elle rêve d’une révolution qui marquerait les esprits et qui serait spectaculaire… Reste à rassembler ses troupes et créer son groupe d’insurgés.

Retrouver Lupano pour un album est comme un gage de valeur sûre. Touche-à-tout, il balade son lecteur dans des univers d’une grande diversité tout en jouant la carte de l’originalité et de la surprise. Comme à chaque fois, je suis conquise. Plongés au cœur de l’Histoire et des révoltes liées à la Commune de Paris, les lecteurs suivent cette héroïne intrépide qui porte en elle bien des combats. De la lutte historique aux germes du féminisme en passant par la défense de la cause animale, Lupano insuffle à cette petite demoiselle cette force viscérale qui conduit au dépassement de soi et qui force l’admiration. Prête à mener son combat, elle se laisse porter par ses nobles idéaux et sa détermination et pourrait faire rougir bien des adultes sclérosés dans leur inaction et leur silence.

Ta mère, elle rêve d’un monde où les femmes font ce qu’elles veulent. Et ce monde, il est pas prêt d’arriver.

Ajoutons à cela que cette histoire prend vie sous un trait que je redécouvrais avec cet album. (J’ai aimé d’amour son album La Danseuse papillon.) Rencontrée aux 21e Rendez-vous de la Bande dessinée d’Amiens, Lucy Mazel est une artiste qu’on regarderait volontiers dessiner des heures. Ses personnages ont de jolies rondeurs et le Paris de 1870 y est dépeint dans sa beauté terrible. Les rues pavées de fin d’automne, le Jardin des plantes et son unique lumière, les voûtes des églises gardant les secrets des réunions clandestines, les premiers flocons d’un hiver trop dur. Tout paraît sensible et délicat, sans pour autant nier la réalité sombre et cruelle des hommes. Un travail tout en finesse qui indéniablement me donne envie de suivre cette dessinatrice de talent. (J’attends d’ailleurs avec impatience son futur album Edelweiss – avec Cédric Mayen – qui d’après notre petite conversation lors de la dédicace de l’album me plaira en bien des points… Wait and see, comme on dit.)

Mes chroniques des albums de Lupano :

Les Vieux fourneaux (1)Ma Révérence Un Océan d’amourLe Singe de Hartelpool.

Le site de Lucy Mazel.

Communardes ! – Les éléphants rouges –

Wilfrid Lupano et Lucy Mazel

Vents d’Ouest

56 pages 14€50

Dès 12 ans

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30 réflexions au sujet de « Communardes ! Les éléphants rouges W.Lupano et L.Mazel »

    1. L’auteur s’appuie sur des éléments réels (avec Castor et Pollux les éléphants de la ménagerie du Jardin des plantes de l’époque) et y apporte les fantasmes révolutionnaires d’une enfant. Bien trouvé, et bien mené. L’efficacité à la Lupano.

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