Et mon coeur fait boum·Neuvième art

Le Vieil homme et la mer – Thierry Murat

Le Vieil homme et la mer – Thierry Murat

Sa peau, ses cheveux, ses souvenirs tout chez lui était vieux. Sauf son regard, qui brillait encore comme un soleil rasant sur la crête.

Un été. Une fille dans le train qui file vers Paris. Le Vieil homme et la mer d’Hemingway comme compagnon de voyage. Quelques mois plus tard, le hasard des calendriers place son adaptation BD sur les étagères de ma librairie préférée. Un bel écho à ma première lecture qui n’en devenait que plus belle puisque signée Thierry Murat. ( Au Vent mauvais…)

Un enfant murmure à l’oreille d’un barbu une histoire d’amour singulière. Celle d’un homme qui aimait passionnément la mer

Oh tu sais, à mon âge ça fait longtemps qu’on ne rêve plus de ceux qu’on aime.

Nul besoin des liens du sang. Il est son grand-père, celui qui lui a permis cette rencontre un peu folle avec la mer, ce rendez-vous magique avec l’océan. Le soleil fort et assommant de La Havane rougit pour mieux laisser place à la nuit. Toutes les couleurs flamboient fièrement avant de se mélanger et de se confondre. Le bleu prend alors ses quartiers nocturnes comme un petit refrain, sonnant la fin du travail, l’heure du repos mérité… Alors il court, vite. Bille en tête. Ces retrouvailles ont le goût de l’interdit. Le vieil homme l’attend. Et comme lui, il a la pêche dans le sang qui – depuis le temps qu’il valse avec les flots – doit avoir un goût de sel. Ses parents ne veulent plus qu’ils partagent ces instants-là. La pêche, c’est de l’argent et voilà bien longtemps que le vieillard n’a plus de quoi appâter les badauds. Plus de butin maritime. Sa barque rentre aussi vide que ne l’est sa bicoque de fortune.

Et pourtant, chaque soir, Santiago repart. Guidé par l’espoir et la certitude qu’il n’a plus rien à perdre. Et si cette nuit était la bonne ? Et si cette nuit était la dernière ? Un petit flic, un gros floc. La ligne se tend. La rencontre peut avoir lieu.

Tu veux ma mort poisson… C’est ton droit camarade. Je n’ai jamais rien vu de plus grand et de plus noble que toi. Alors, vas-y, tue moi. Ça m’est égal, lequel de nous deux tue l’autre.

Lignes d’horizon, de pêche, de la main. Deux vies reliées par un fil pour une valse macabre sous le silence d’une nuit pleine d’étoiles timides. Murat se fait conteur, et rend grâce au merveilleux récit d’Hemingway. Faite de tête-à-tête en échos, l’œuvre – sous la parfaite orchestration de Murat – réussit à nous captiver et nous invite à contempler cette interminable nuit. Promesses de l’aube, douceur de l’aurore, éclats du soleil méridien, lumière éblouissante, naissance discrète de ce ciel entre chien et loup, crépuscule scintillant , aubes du soir… La palette de Murat est d’une richesse sans nom et rythme à merveille ce ballet maritime,  permettant au temps qui passe d’enrober de ses ambiances et de ses nuances, une histoire qui n’est pas qu’une simple partie de pêche. La narration se veut lente, fidèle à l’œuvre d’Hemingway, mais cela importe peu. Le découpage surprend au détour d’une case brisée, éclaboussée par le sang et l’eau durant cette nuit cauchemardesque qui se joue sur cette mer d’huile. Sans aucun doute, me voilà une nouvelle fois conquise par ce talent-là… Bravo m’sieur Murat.

Les chroniques de Yaneck, Yvan et Noukette.

Le blog de Thierry Murat. Son site.

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Le Vieil homme et la mer – Thierry Murat

D’après le roman d’Ernest Hemingway

Futuropolis – Oct 2014

ISBN : 9782754809481

128 pages / 19euros

 

 

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