Volutes de fumée. Une main qui caresse les touches d’un piano droit, des doigts qui pincent les cordes d’une contrebasse. Des talons hauts sur un vieux plancher qu’on entendrait presque grincer. L’insouciance a parfois cette saveur-là. Ce soir, il boit sa bière adossé contre le mur et ne voit qu’elle dans sa robe qui virevolte. Ce soir, elle se laisse emporter par une musique qui masque les tracas, elle oublie, juste un instant. Ce soir, ils essaient de croire plus d’une seconde en leur liberté illusoire.
« Ici, tout le monde est étranger ou presque. Si on se montre discret, il est donc facile de passer inaperçu… Mais on n’en devient pas invisible pour autant. »
Livia, Sean et Joaquin ont fui Cuba, une mallette pour seul trésor dans le coffre de leur voiture. Joaquin ne parvient à se départir de l’image du gentil garçon candide et protecteur et doit supporter le bellâtre blond qui s’offre Livia contre des petites enveloppes savamment dosées en cocaïne -son péché mignon-. Leurs errances les entraînent sur les routes ocre à bord de leur Buick rutilante. Motel, diner, station-service… Les ingrédients du road trip sont là, mais cette échappée belle manque cruellement de légèreté. Non loin de là, la troupe de Batista rôde. La fierté de la mafia cubaine a été ébranlée depuis la fuite du trio téméraire avec la favorite du grand chef. Joaquin et Livia ont déclenché une machine infernale dont la puissance les dépasse clairement. Mais ils roulent, se prennent au jeu de l’errance et de ses incertitudes et s’éloignent, la mort aux trousses.
» Ce que j’apprécie le plus dans les voyages, ce sont les rencontres.«
Point final du dyptique de Régis Hautière et Berthet, cet album s’inscrit parfaitement dans l’esprit de cette collection ligne noire. Tout au long de ce voyage aux allures de chasse à l’homme, le jeune Joaquin grandit très vite et prend une belle et sombre envergure, déployant toutes ses forces pour assurer la protection de la belle Livia. Ainsi, il tentera par tous les moyens de s’affranchir de cette image un peu trop lisse dans laquelle il était enfermé dans le premier opus. Il s’affirme et prend les décisions que la course-poursuite leur impose dans un combat où tout semble pourtant perdu d’avance. Tenace, intrépide, il file droit. Le lecteur est emporté avec lui dans cette course folle et sentira tout comme lui le poids du danger qui rôde et le souffle chaud des prédateurs qui guettent leur proie, dans un silence que seuls les coups de feu savent rompre sans scrupule. Le scénario tissé par Hautière est efficace, sombre et tranchant et me réconcilierait presque avec le polar. Les dessins de Berthet sont, quitte à me répéter, assez éloignés de ma sensibilité graphique, mais force est de constater qu’ils servent à merveille l’univers et les codes du genre. Berthet joue sur les nuances, s’amuse des contrastes. Des parkings sordides noyés sous une pluie glaciale qui se mélange au sang des cadavres aux paysages désertiques où les corps sont enfouis sous un soleil de plomb, les décors se succèdent au rythme de cette diabolique fuite en avant et confèrent au récit un rythme vif et haletant. Il y a juste ce qu’il faut de ce trait un peu surannée qui transporte le lecteur dans une Amérique en pleine mutation, déjà nécrosée par une poignée d’hommes de pouvoir qui ne jurent que par la grisante corruption et les billets verts tachés de sang tout en se délectant de leur sale or blanc dans l’ombre et la sueur des étreintes coupables.
Ma chronique du tome 1: ici.
Perico Tome 2
Hautière et Berthet
Couleurs: Dominique David.
ISBN 978-2-5050 1996-1
64 pages – 14.99€
L’histoire et le graphisme ne me tentent pas trop.
Je passe.
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Passer une BD signée Régis Hautière a quelque chose de criminel à mes yeux. (Oui, je donne parfois dans l’excessivité.)
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Bon , ok, je regarderai la BD dans une librairie 😉
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Ah, je préfère. (Ceci dit, cette BD avait tout pour me déplaire et finalement, j’ai beaucoup aimé. Comme quoi…) 😉
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Je m’en vais noter… ça me tente bien ce que tu dis-là 😉
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Tu me tentes énormément …
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Alors j’espère que tu apprécieras. 😉
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Je te lis en diagonal parce que cet album sera ma prochaine lecture BD. Mais en ce qui me concerne, Berthet est depuis des dizaines d’années très proche de ma sensibilité graphique 😉
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Alors tu aimeras. 😉
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Je me le ferai bien un jour le plaisir de le lire ce diptyque !!
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Je te le souhaite vivement!
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Lecture à venir, tu t’en doutes ! 😉
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Ah ça oui… Enjoy !
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Comme ça a l’air bien! J’aime beaucoup ces errances dans cet endroit et à cette époque. Je suis conquise d’avance!
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C’est vraiment un diptyque étonnant.
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