« Mais j’avais des choses à régler.
J’enviais très fort cette liberté de ce monsieur sans attache.
Pour ma part, j’étais lié à trop de choses encore…
De ces chaînes que nous impose si souvent la vie« .
Un Festival BD qui compte Renaud Dillies parmi ses invités a d’office droit à mon admiration et ma reconnaissance éternelles. Qu’on se le dise… Cette année, non seulement le 19e Rendez-vous de la Bande dessinée d’Amiens comptait une liste d’invités à vous faire oublier tout autre festival, mais il accueillait surtout LE dessinateur dont j’admire infiniment le travail. En ce mercredi BD j’ai donc choisi de chroniquer un album qui se fait rare chez les libraires puisqu’il est actuellement épuisé. Il se trouve dans les bonnes bibliothèques ou chez les bons amis… Autant vous dire qu’il s’agit là d’une lecture précieuse…
Scipion notre héros est un échassier dandy que l’on suit grâce aux volutes de fumées qui s’échappent d’une cigarette qui ne cesse de se consumer. Long bec, nœud-papillon en velours, chemise blanche aux manches retroussées : il erre de sentier en sentier et se laisse porter le long des chemins champêtres, et va ici et là, au gré de ses rencontres. Il est un doux rêveur et ses grands yeux ronds laissent entrevoir toute la candeur qui émane de cet être à plumes longiligne.
» Soit il est fou, soit c’est le plus généreux du monde. En tout cas, je rêverais d’avoir un ami comme le vôtre »
Il croise alors Tchavolo, qui porte en lui toutes les promesses d’une belle amitié. Chat de passage, il mène sa roulotte vers un ailleurs encore incertain. Il vient de loin mais regarde droit devant lui. Quand Tchavolo rêve, il regarde les nuages, et les formes rondes et blanches prennent alors l’apparence d’une guitare ou celle d’une femme aux courbes insaisissables. En une soirée et quelques mots, une amitié voit le jour. Scipion rentre heureux pour rejoindre sa bien-aimée. Oh comme il l’aime sa Daphné, elle qui incarne à elle seule l’idée qu’il se fait du bonheur. Quelle n’est pas sa surprise quand il découvre sa fiancé dans les bras d’un autre que lui. Le sol s’échappe, et son petit monde s’engouffre sous ses pattes, emportant avec lui une innocence à jamais perdue. L’amoureux rêveur n’est plus, seul le poids de la trahison l’étouffe et l’écrase, brisant son cœur qui n’aimera plus jamais avec cette fougue de l’infinie passion.
» Cinglé de rester, fou de partir. Alors, je me suis décidé à faire la seule chose que je savais bien faire jusqu’à présent… Fuir !«
Scipion laisse alors toute sa vie d’avant derrière lui, son violon pour seul compagnon de route. Ses mélodies seront ses complaintes, ses airs des cris de douleur, ses notes des larmes arrachées au silence du crépuscule. Se laisser porter, s’échapper sur un poisson volant et se dire qu’au bout du chemin il retrouvera Tchavolo, le chat épris de cette liberté qu’il lui envie tant. Une quête en musique, une traversée du désert, une pause sous les étoiles.
Qu’elles s’appellent Betty, Epilie ou Daphné, les femmes sont celles qui partent, trompent ou abandonnent. Les héros de Dillies sont des êtres brisés par la trahison. Un jour ma douce, je t’ai dit que la vie était une putain pour les êtres qui voulaient croire aux nobles sentiments, cette amère mélodie au crépuscule en est l’exemple parfait. Les démons dilliesques resurgissent d’œuvre en œuvre sans que jamais la lassitude ne prenne le dessus sur les histoires déchirantes qu’il nous conte… Je reste totalement fascinée par cet univers singulier et sublime capable de lier à merveille les planches lumineuses, sereines et légères aux planches inondées de la plus grande noirceur et de la plus douloureuse des tristesses. Le dessin de Dillies atteint ici un raffinement qui annonce les prouesses graphiques de Saveur Coco et les incontournables motifs « signatures » de Renaud Dillies sont semés au fil d’une lecture qui remue les entrailles… On se fraie un chemin entre les étoiles et le tourbillon des notes, on se laisse porter par l’aura de Django Reinhardt et on savoure, chaque mot, chaque trait. Parce que cette lecture-là est un trésor des plus rares et précieux, une balade poétique dévastatrice.
Pour vos oreilles : Mélodie au crépuscule Django.
Les avis de Jérôme , Noukette et Yaneck.
Mélodie au crépuscule Renaud Dillies
Paquet
78 pages / 15,50 €
Une merveille, assurément…
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Vu chez Marion, recherché dans les bibliothèques et autres, en attente d’une bonne âme pour le découvrir .
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Si nous arrivons à nous voir cet été je peux être cette bonne âme ! 😉
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On trouve vraiment toute la sensibilité de Dillies, dans ce livre. Il dit beaucoup sur l’artiste.
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Je suis bien d’accord avec toi – mais cela ne te surprendra pas-. J’ai ajouté ton lien ! 😉
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je ne suis pas surpris. Et en même temps, tu as raison…
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Du Dillies pur jus, j’adore !
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Et le mot est faible ! 😉
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Il est à la bibliothèque où je travaille, j’aime tellement d’amour cet album que j’ai bien pensé le piquer mais il parait que ça ne se fait pas 🙂 …alors j’attends une réédition ou de le trouver d’occasion…!!
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Il parait oui. Mais je comprends que des pulsions que la morale réprouve puissent naître face à un tel bijou…
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Fascinée je suis aussi, cet album là est un bijou…!
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Comme tout ce que fait Dillies… 😉
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Toujours pas lu de Dillies… une honte ? 🙂
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Une honte, non mais un vide immense à combler assurément. Commence par Abélard puis lis Betty Blues et tout le reste à vrai dire…
Vraiment.
(On ne dirait pas comme ça, mais c’est presque un ordre.) 😀
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Abélard est déjà noté et surligné. Je vais donc certainement obéir à cet ordre mais après les vacances 🙂 Mes lectures sont déjà prévues !
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Ravie je suis ! Hâte de lire ta chronique ! 😉
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Je viens de découvrir Abélard et là cet album maintenant!! mais juste pour baver d’envie puisqu’il est épuisé et tu crois que ça fait plaisir!! bon je vais voir si ma biblio l’a et si ça se trouve je fais un scandale:)
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Pour patienter je te conseille vivement Betty Blues qui est aussi de toute beauté. Et Sumato aussi. (ça ira pour patienter ??)
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