Et mon coeur fait boum·L'Art du Roman·Les classiques c'est fantastique

L’Assommoir – Émile Zola

La lecture de L’Assommoir est incontournable pour qui s’éprend de la littérature. Il fait partie de ces monuments littéraires qui effraient un peu avant même d’en avoir lu les premières lignes et l’on se sent tout petit face à la couverture qui renferme cette histoire-là.

Elle se sentait prise d’une sueur devant l’avenir et se comparait à un sou lancé en l’air, retombant pile ou face, selon les hasards du pavé.

Ce septième tome nous permet de suivre un des grands noms qui a marqué l’histoire des Rougon Macquart. L’Assommoir retrace la vie tumultueuse de la belle Gervaise Macquart et de son compagnon Auguste Lantier. Très vite délaissée – monsieur Lantier est volage et grand séducteur – Gervaise doit assumer la lourde charge d’un maigre salaire et de deux enfants : Claude et Etienne, futurs protagonistes de Germinal et de la Bête humaine. Suite à cette rupture des plus douloureuses, notre héroïne ne cessera de montrer ostensiblement qu’elle n’a rien à voir avec sa triste ascendance et se refuse de céder à la moindre tentation alcoolisée.

[…]quand un père se soûle comme le sien se soûlait, ce n’est pas un père, c’est une sale bête dont on voudrait bien être débarrassé.

Gervaise ne cesse de vouloir montrer au monde qu’elle est une femme forte, de grande volonté, pleine de principes, fidèle et respectueuse de la morale. Ô combien associée à la pureté – elle a la peau claire, est blanchisseuse –  Gervaise semble être la femme que tout le monde rêve d’avoir à ses côté tant sa force de caractère la définit.

Son rêve était de vivre dans une société honnête, parce que la mauvaise société, disait-elle, c’était comme un coup d’assommoir, ça vous causait le crâne, ça vous aplatissait une femme en moins de rien.

Mais tout est habilement calculé par Zola : de son ascension sociale à sa lente agonie, cette beauté chaleureuse, riche de ses premiers succès laissera lentement la place à une femme écœurante et rongée par le vice. La déchéance sociale ira de paire avec la destruction du corps. Tout ce que Gervaise aura cherché à fuir ne fera que la rattraper de plus belle et les effluves alcoolisés du mystérieux « Assommoir » viendront l’arracher à son quotidien fragile et à son éphémère succès.

Ah ! Non, par exemple, la misère ne tuait pas assez vite.

Gervaise est et restera un personnage « liquide ». Où qu’elle soit, l’eau est présente. Pure, saine et limpide au temps des succès ; trouble, sale et boueuse quand vient l’heure de la chute. C’est cette liaison intime avec la « liquidité » qui causera sa perte puisqu’elle se laissera submerger par un redoutable adversaire : l’alcool, elle qui pourtant, ne jurait que par l’importance d’être bien sobre avant d’épouser Coupeau… Je crois qu’elle est une des héroïnes de roman les plus malmenées de la littérature française. Cette Banban n’aura d’ailleurs d’autre destinée que d’enfanter de la « vermine » et de transmettre ses vices : Anna, (future héroïne de Nana) sera à la hauteur des tares maternelles.

Une œuvre qui détrône tous les Zola lus jusqu’à aujourd’hui tant j’ai aimé son implacable noirceur...

Quand on boit seul, on crève seul, voilà !

BO des pages tournées : Sans ivresse – Rose

(Chronique de 2011 rapatriée Au milieu des livres.)

La chronique de Fanny.

L’Assommoir – Émile Zola
Éditions Gallimard – Collection Folio
ISBN: 9782070411436
7e Tome des Rougon-Macquart
Les Classiques c’est fantastique.

9 réflexions au sujet de « L’Assommoir – Émile Zola »

    1. (Je rapatrie tous mes articles zoliens de l’ancien blog. Mais je ne savais pas qu’une newsletter partait à chaque fois zut !) Et tu fais bien pour la lecture en diagonale. J’aurais fait la même chose. Ces chroniques ont quasi 9 ans, c’est étrange de les relire pour les reprendre…)

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